notre substance aux animaux ou aux plantes, puis la métempsycose indoue et grecque, avec souvenir plus ou moins vague du passé ; enfin, la palingénésie, sans mémoire, transcendantale, en un mot, incompréhensible. Toutes conceptions plus ou moins mystiques, pour lesquelles vous avez gardé un sourire de dédain. Que diriez-vous si nous les retrouvions maintenant par une autre voie qui vous soit plus vénérable, et que certains de nos contemporains ont suivie parallèlement à celle dont nous venons de parcourir les étapes ? Comme si les progrès du savoir humain n’empêchaient pas notre esprit, dès qu’il s’applique aux principes premiers, de tourner toujours dans un même cercle de murailles dès longtemps fermées autour de lui !
Quand le matérialisme ou monisme contemporain a rejeté la notion d’une âme distincte du corps, il lui a bien fallu conserver l’idée d’atome et douer ce dernier d’une âme élémentaire sous le nom de force. L’univers est constitué par l’union indissoluble de la matière et de la force : c’est entendu ; mais, en d’autres termes, car nous ne pouvons l’imaginer sans ce secours, par des myriades d’atomes doués de petites âmes qui les animent et les meuvent suivant des lois. Donnons-nous donc à présent le spectacle de la migration de ces petites âmes.
Voici d’abord dans cette conception un premier degré, qu’on pourrait qualifier de scientifique, car nous sommes ici sur le terrain solide des conquêtes certaines réalisées par la science de la nature. J’entends vous signaler les lois de la conservation de la force, et de la matière chimique, que vous connaissez d’ailleurs mieux que moi. Dans ces deux ordres de choses, rien ne se perd et rien ne se crée : le moindre des élémens expulsés d’un corps retrouve sa place en quelque combinaison nouvelle. Et, sous une forme moins générale, ce fut, je vous l’ai dit, l’une des premières remarques des lointains sectateurs de la migration des âmes, puisque, déjà, les ancêtres védiques, déposés dans le tombeau, « se glissent vers la racine des plantes. » La science moderne s’est contentée d’étendre davantage cette vérité. Au cours de notre vie même s’établit entre notre personne et la nature ambiante un échange ininterrompu d’élémens constitutifs. Et certains physiologistes estiment que le corps humain tout entier se renouvelle dans l’espace de quelques semaines, par assimilation et désassimilation ; car la respiration, les sécrétions l’émiettent plus rapidement qu’on ne saurait l’imaginer, tandis