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De 1830 à 1840, pas de colonisation officielle, en revanche colonisation des plus prospères. De 1840 à 1851, la colonisation officielle est à son summum d’activité et la colonisation libre est arrêtée en plein essor. De 1851 à 1871, arrêt dans la colonisation officielle et reprise de la colonisation libre. De 1860 à 1871 notamment, il n’y a eu d’implantés que 4 582 colons officiels et il y eut un accroissement total de 32 000 colons. Enfin, de 1871 à 1878, avec le plus grand effort de l’Etat pour implanter administrativement des colons, coïncide un recul des plus marqués de la colonisation proprement dite : l’accroissement total de la population rurale n’est plus que de 19 728 âmes, et cependant on a implanté 43 500 colons officiels. En revanche, le progrès n’a jamais été plus rapide que depuis 1882,

À ce moment, la colonisation officielle est en partie arrêtée, les crédits sont réduits et l’emprunt de 50 millions réclamé par la représentation algérienne est refusé par les Chambres. Et la colonisation libre, loin d’en souffrir, n’a jamais eu de période plus prospère. De 1878 à 1889, on n’installe que 11 000 colons officiels, et le nombre des Français immigrans s’élève chaque année à 6 500 en moyenne ; la population rurale s’augmente à elle seule de 69105 unités. Depuis 1889, la colonisation officielle se trouve réduite à son minimum d’activité ; elle ne réussit notamment qu’à implanter 108 colons en 1897, et c’est alors que la colonisation libre déploie les plus grands efforts pour transformer le pays. Dans les années de la période de 1884 à 1893, les Européens trouvent le moyen d’acheter, tant aux musulmans qu’aux israélites indigènes, 242 000 hectares de terres, et 81 995 environ au Domaine. De ce moment date aussi le merveilleux essor pris par la culture de la vigne. En 1880, on ne comptait en Algérie que 17 000 hectares complantés en vignes, produisant en moyenne 300 000 hectolitres. En 1901, on compte environ 130 000 hectares, produisant 5 millions d’hectolitres. Constamment on trouve que le progrès de l’immigration libre est en raison inverse de l’activité de la colonisation officielle. Cette opposition constante, cet antagonisme des deux procédés de colonisation pourront paraître à quelques-uns surprenans ; on peut cependant donner de ce fait en apparence paradoxal une explication plausible et rationnelle. La première condition du fonctionnement de la colonisation officielle, c’est la possession par le Domaine d’une grande quantité de terres destinées à