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V

Il est temps de conclure et de tirer de tous ces faits les principes qui les relient.

Ni nos lois sociales, ni nos lois d’assistance n’ont su donner au citoyen sa part d’action. Celles qui la lui ont faite n’ont pas été exécutées par les agens de l’administration jalouse de leurs droits.

Mais l’homme lui-même a-t-il su user de sa propre initiative ? N’a-t-il pas cherché dans les lacunes de la loi une excuse à sa propre lâcheté ? A-t-il compris qu’une société ne vaut, qu’elle n’est douée d’activité et de vie, que dans la mesure où les membres qui la composent ont le sentiment de leurs devoirs sociaux ? Il ne s’agit pas d’un sentiment vague, d’une volonté abstraite ; il faut que ce devoir soit l’inspirateur très direct des actions ; que chacun ait sa charge et soit prêt à l’accomplir ; que nul n’ignore son poste. Celui qui demeure volontairement étranger à toute tâche, qui, en présence des maux publics, des souffrances privées, de la misère, détourne la tête pour ne point voir et se contente de gémir, celui-là est un mauvais citoyen.

Donnons-nous à ce devoir la place qu’il comporte ? En parlons-nous suffisamment à nos concitoyens, surtout à la jeunesse ? L’éducation tout entière est-elle dirigée vers ce but ? Y voyons-nous l’achèvement et comme le couronnement de son œuvre ?

Répétons-nous à l’écolier le plus brillant, au jeune homme sorti de nos Universités avec tous les succès, qu’il est incapable de devenir un citoyen, s’il n’en remplit pas les obligations ? Lui disons-nous que ses efforts peuvent prendre des formes très diverses ? Enfance ou vieillesse, instruction ou assistance, charité libre ou œuvre sociale, ce sont autant d’objets qui conviennent aux diversités de l’intelligence et du cœur, qu’il faut offrir aux préférences individuelles, et qu’il serait absurde de leur imposer ; mais le jeune homme doit faire son choix ; de très