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En entendant vos vers improvisés, je serais tentée de vous prendre pour le chanteur qui a vécu en ces lieux, il y a plus de cent ans. La maison d’où vous venez est sa demeure natale, transformée en l’honneur de sa mémoire. Et, comme vous m’avez parlé tout à fait dans son style, je me ferai un plaisir de vous guider par les sentiers aimables où il cherchait sans cesse sa chère Clara. Sachez-le : je m’appelle aussi Clara, ou, plus exactement, Clara-Élisabeth, et je suis une grande et passionnée admiratrice de sa Muse. Mais ce pays ne m’a pas vu naître : je viens de loin, de la Bourgogne ensoleillée, et je ne me suis transportée ici que pour y retrouver la trace de ses chants.


Telle est donc le destin glorieux que rêve dès à présent notre poète. Il assiste ainsi dans une sorte de songe à son apothéose future, et la France semble destinée à tenir une place éminente dans le chœur admiratif de la postérité. Mais ce n’est pas assez, et la renommée du cultivateur de Warmbronn, qui a si volontiers parcouru les espaces sidéraux sur les traces de sa Clara, ne saurait être restreinte à notre misérable globe. Il est permis de penser que l’univers entier se souviendra de l’avoir contemplé au passage, et s’associera de bon cœur à l’enthousiasme terrestre, car voici les dernières lignes de la Foi Nouvelle. C’est la question soixante-douzième du Catéchisme de l’avenir[1] :


N’y aurait-il pas, pour qui a réalisé son perfectionnement dans le sein de Dieu, une autre pensée plus élevée, qui fût capable de l’emporter au delà des limites de la terre et du temps présent, vers une période où il n’y aura plus ni terre, ni soleil, mais seulement un monogramme étincelant, peut-être celui du plus divin fils de la terre, qui flamboiera au ciel nocturne sous l’aspect d’une constellation plus durable que notre groupe planétaire ?

Réponse. — Oh, oui ! la constellation rayonnante de la Chèvre et d’Orion offre peut-être un tel monogramme.

Qu’est-ce donc qui rayonne si haut dans le firmament nocturne ? N’est-ce pas un monogramme qu’un esprit m’explique, et qui, apparu tout récemment pour les mortels, flamboierait au ciel éternel comme un monument impérissable de gloire ? monument de gloire tel que le monde n’en connaît pas de semblable, que de fois tu as gonflé mon cœur de désir. monument de gloire, dans l’éternel azur, c’est en toi seul que je trouverai satisfaction.


Or, la Chèvre est l’étoile de première grandeur du Cocher : et, si l’on jette les yeux sur une carte céleste, on reconnaîtra sans peine que, avec un peu de bonne volonté, cette constellation jointe à celle d’Orion dessine vaguement les initiales C. W. Fantaisie

  1. Nouveaux Poèmes, p. 113.