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à transporter. On sait l’importance de la poste européenne pour l’Extrême-Orient ; ce qu’on sait moins, c’est que le transport en est très rémunérateur. On conçoit l’importance qu’aurait pour l’Europe une voie postale indépendante des départs plus ou moins fréquens des paquebots, et plus rapide à coup sûr que la voie de mer. Le gouvernement russe compte en effet effectuer quelque jour ce transport. Toutefois, le service postal doit être avant tout très régulier. Or, jamais l’Europe ne risquera son courrier d’Extrême-Orient par la voie sibéro-mandchoue, tant qu’elle ne sera pas assurée d’un service rigoureusement exact. Il faudra donc, d’abord que la voie circo-baïkalienne soit achevée, ce qui coïncidera à peu près avec l’achèvement définitif du Transmandchourien, c’est-à-dire avec l’automne 1904 ou le printemps 1905. Il faudra de plus que le matériel roulant soit complété ; que le personnel sibérien soit dressé à l’égal du personnel russe ; que les vols dans les trains, pratiqués en douceur, avec effraction ou à main armée, soient relégués dans le domaine de la légende ; que les horaires des trains soient à peu près respectés ; que les amoncellemens de neige ne soient plus des obstacles imprévus et insurmontables ; que les déraillemens soient une exception... Il faudra que des services réguliers de paquebots rayonnent de Port-Arthur ou de Dalni à Tien-Tsin, Chefou, Hong-Kong, au Japon, etc. Il faudra enfin, et la requête n’est pas mince, que le gouvernement russe laisse sans broncher franchir sa frontière à la marchandise qu’il redoute le plus : les lettres et les journaux. Alors seulement un service postal pourra s’établir, auquel l’Europe tout entière confiera son courrier d’Asie. Les Russes ont tant d’énergie et d’amour-propre qu’ils sont bien capables, après tout, d’arriver à cet état de perfectionnement beaucoup plus tôt que nous n’osons l’espérer.

Pour les marchandises, il en est peu qui aient intérêt à transiter par terre. Le fret maritime est si peu élevé qu’une différence d’une dizaine de jours dans le délai de livraison ne sera guère considérée. Un paquebot porte d’ailleurs, sans distinction de vitesse, tous les articles de son chargement : pour le chemin de fer, il n’en est pas de même ; or, quel sera le temps de parcours de la petite vitesse ? Deux ou trois mois sans doute ! Les thés, a-t-on dit, passeront par le Transsibérien. Quelques-uns, sans doute, seulement destinés à la Sibérie ou à l’Oural. Malgré l’élévation des droits de douane à l’entrée par mer à Odessa,