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milliards. Avec l’annuité de 30 francs, les charges de l’Etat atteignent au maximum 156 184 000 francs. Le capital des caisses régionales est évalué à 8 milliards.

Ce n’est pas le moment de discuter ces conclusions : une trop longue expérience nous a appris que le projet subirait encore bien des modifications avant d’être voté par le Parlement. Ce n’est pas, non plus, notre intention de proposer ici un contre-projet. Après avoir exposé l’état de la question en France, nous croyons plus utile de montrer comment elle a été résolue en Allemagne, quel est le fonctionnement de l’assurance obligatoire, quels résultats elle a donnés, et quels sont les lacunes ou les inconvéniens révélés par la pratique.

La plupart des objections qu’on peut faire à la création des retraites pour l’invalidité et la vieillesse portent sur des points de fait. Beaucoup de bons esprits ont contesté la possibilité d’une organisation complète comprenant tous les travailleurs ; d’autres redoutent pour l’industrie et pour les finances de l’Etat une surcharge écrasante, ou s’inquiètent de cette masse de capitaux enlevés à l’épargne individuelle et à l’initiative privée pour s’entasser, dans les caisses du Trésor ; on a considéré un semblable système économique comme incompatible avec l’expansion extérieure et l’exportation ; on se préoccupe surtout de l’extension nouvelle donnée au fonctionnarisme. Tous ces reproches sont graves, et il est particulièrement intéressant de voir comment l’Allemagne, dont la prospérité économique paraît aller sans cesse croissant a su éviter dans l’organisation de l’assurance obligatoire tous les écueils que nous avons signalés.


IV

L’organisation des assurances sociales n’a pas soulevé en Allemagne les mêmes objections de principe qu’en France, parce que les corps communaux, en Allemagne (communes, provinces), ont, depuis longtemps, l’obligation stricte de nourrir leurs pauvres. Ce pays, comme un certain nombre d’autres, notamment l’Angleterre, a inscrit dans son droit public l’obligation légale d’assistance. Lors de la sécularisation des biens d’Eglise, au moment de la Réforme, les gouvernemens durent se préoccuper des charges qui grevaient ces domaines en vertu d’affectations spéciales au profit des pauvres, des malades et des