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suivis. Est-ce un pas vers la paix ? C’est possible : ce n’est pas encore bien sûr.

Quoi qu’il en soit, la réponse officielle de lord Lansdowne à la note néerlandaise est correcte dans le fond et courtoise dans la forme : elle est ce qu’elle devait être, étant donnés l’attitude qu’avait prise le gouvernement britannique et l’état de l’opinion dans le Royaume-Uni. M. Kuyper ne pouvait guère attendre autre chose. On rend hommage aux sentimens qui l’ont inspiré ; on discute les termes de sa suggestion ; on entre dans les détails de ce que les Boers peuvent faire, s’ils veulent aboutir rapidement à la paix. A cela nous n’avons rien à reprendre, du moins dans la forme, mais il est impossible de rendre le même témoignage au discours que lord Salisbury a prononcé quelque quarante-huit heures plus tard au Junior Conservative Club.

Les défauts du noble lord s’accentuent avec l’âge ; la causticité de sa parole devient de plus en plus amère et blessante, et cela sans aucune utilité appréciable ; il semble que ce soit par simple amour de l’art. Si cela continue, bientôt M. Chamberlain pourra lui envier quelques-uns de ses procédés oratoires. Dans le discours auquel nous faisons allusion, lord Salisbury n’a pas dit autre chose que lord Lansdowne, mais il l’a dit sur un tout autre ton, qui assurément n’est pas le bon ton. Quelque jugement qu’on porte sur la démarche du gouvernement néerlandais, elle méritait d’être traitée avec déférence ; lord Salisbury a affecté de dire qu’il lui était impossible de découvrir les motifs qui avaient provoqué ce qu’il a appelé une « crise d’avortement. » — Je suppose, a-t-il dit en substance, que les démarches importantes qui sont faites par des peuples importans, pour des sujets de quelque importance, sont dictées par un motif ou par un autre. Mais je suis absolument incapable d’imaginer quel but a espéré atteindre le gouvernement hollandais, s’il n’avait aucune autorité pour parler de la part de ceux de nos ennemis qui habitent sur le continent. Le gouvernement ignore le motif de cette curieuse démarche. — C’était abuser avec cruauté de la situation, à la vérité un peu fausse, où s’était placé le gouvernement néerlandais en disant qu’aucune entente n’existait entre les délégués boers et lui. La note de lord Lansdowne avait touché ce point d’une main très précise, mais plus légère. Quant au motif de la curieuse démarche du gouvernement hollandais, il l’avait aussi très équitablement apprécié. Il avait fait mieux, puisqu’il s’en était inspiré dans les développemens assez longs qu’il avait donnés à sa propre pensée. S’il était vrai que la démarche néerlandaise n’avait aucune raison d’être, la seconde partie de la