son lit ? » Ailleurs, une mère désespérée regarde mourir lentement son fils, tandis que son mari, emprisonné au Château Saint-Ange, attend la sentence d’exil. L’enfant respire à peine. Elle écoute avec une angoisse passionnée les battemens de plus en plus faibles de son cœur. Puis l’enfant meurt, le mari est au loin, la femme reste seule et elle pleure : « Pourquoi suis-je au monde ? Pourquoi Dieu ne me prend-il pas, maintenant que je suis seule et que mon fils est mort ? » Mais elle se blâme d’oser se révolter contre la divine Providence, et, avec un abandon de confiance désolée, elle crie vers la Vierge et l’appelle « Maman ! » « C’est ici que mon petit Luigi jouait, c’est ici qu’il se jetait à mon cou, c’est ici que je l’ai vu devant moi disparaître peu à peu… Qui peut dire la passion de Jésus-Christ, si la douleur d’une mère est si affreuse ! »
- Chi ppò ddi la passion de Ggesucrito,
- Si er dolor de una madre è accui fforte !
De tels accens, une telle plénitude de cœur, sont le privilège des mères. Les hommes éprouvent bien quelque chose de ces souffrances : l’un des Romains de Belli dit, avec une force où l’on sent encore frémir son émotion, la stupeur qui l’a saisi, la nuit dernière, quand, éveillé en sursaut, il a cru que son Raimondo se mourait. Mais ce ton est rare. L’homme a plus de sang-froid que la femme. Ses impressions, même aussi vives, s’étendent moins ; elles n’occupent pas tout l’esprit qu’elles frappent, et elles l’occupent moins longtemps : en dehors de la famille trop d’objets divers l’attirent. Il en est ainsi partout. Mais la différence des deux sensibilités s’accuse davantage chez les peuples du Midi, où la femme reste vouée aux soins domestiques tandis que l’homme passe presque tout son temps hors de chez lui, sous un ciel clément qui permet les métiers intermittens, les longues Huileries et les bavardages sans fin. Le Romain est toujours un homme de place publique. À sa femme les affections et les émotions de la famille, les travaux et les amusemens naïfs du foyer. À lui les distractions plus coûteuses, les raisonnemens entre amis, les préoccupations politiques, les curiosités de tout genre, le jugement sur toutes choses, en un mot la liberté d’action et la vie de l’esprit. L’âme des Romaines de Belli est fort simple : un peu plus de piété ici, là un peu plus de