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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 avril.


La journée du 27 avril ne nous a apporté que des résultats incomplets. S’il y a eu 414 élections définitives, il reste en suspens 174 ballottages dont nous ne connaîtrons le dénouement que le 11 mai. Mais, dès aujourd’hui, on peut dire que le ministère et ses amis sont loin d’avoir remporté la victoire sur laquelle ils comptaient. Au lieu de gagner du terrain, ils en ont perdu partout, à Paris et en province. À Paris, dès le premier tour de scrutin, six sièges leur ont été enlevés : les vainqueurs sont des républicains libéraux comme M. Charles Benoist, dont les lecteurs de la Revue connaissent la forte érudition et l’excellent esprit, et des nationalistes comme M. Syveton, un des membres les plus actifs de la Patrie française. En province, il serait plus difficile de donner avec une certitude absolue le chiffre des sièges gagnés ou perdus, parce qu’on n’est pas encore fixé sur le caractère d’un certain nombre de nouveaux élus : les agences officieuses les qualifient simplement de républicains et attribuent d’avance leurs voix au gouvernement ; mais c’est ce qu’il faudra voir. Nous ne nous étions d’ailleurs pas attendu à des modifications profondes dans la composition de la Chambre. Notre histoire politique n’en offre pas d’exemple depuis un quart de siècle. C’est par des changemens lents et partiels que la situation évolue et se transforme ; mais ; dans une assemblée où la majorité n’est jamais bien considérable, ni bien solide, leur importance morale et durable est plus grande que ne l’est au premier abord leur importance matérielle. Il est rare chez nous qu’un parti soit ce qu’on appelle écrasé : en revanche, un parti amoindri est bien près d’être battu, surtout lorsqu’il détient depuis longtemps le pouvoir et qu’il n’a pas su s’y fortifier.