Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1902 - tome 9.djvu/866

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« qu’il ferait toujours passer le bien de la Reine et de son pays avant toute considération personnelle, » cependant, le caractère du personnage permet de penser que les circonstances politiques difficiles où se trouvaient alors ses amis politiques et lui-même n’étaient pas sans influence sur une détermination aussi ferme[1].

Même désir dans le camp français. Le Duc de Bourgogne brûlait de se distinguer. Nous avons vu, par ses lettres à Philippe V, quelle joie lui avait causée la perspective de rentrer bientôt en campagne. Nous trouvons l’expression du même sentiment dans une seconde lettre qu’il adressait encore à son frère le 29 mai, c’est-à-dire quatre jours après son arrivée à Valenciennes. « L’armée est icy très belle, et de très bonne volonté, lui écrivait-il, et M. de Vendôme n’en a pas moins de trouver une occasion de les combattre (les ennemis)… J’espère, mon cher frère, que, si nous trouvons une occasion heureuse, nous pourrons remettre sous votre obéissance une partie du pays que vous perdîtes il y a deux ans, et, sans penser au bien public, qui doit toujours aller le premier, la tendresse infinie que j’ai pour vous me feroit ressentir avec bien du plaisir que j’y aurois eu quelque part[2]. » Les dispositions où il se trouvait étaient connues de toute l’Europe, et Godolphin écrivait à Marlborough : « Je suis d’accord avec vous que l’occasion d’une action se présentera bientôt, non pas seulement à cause de la supériorité de forces dont les Français se prévalent, mais en raison du tempérament impétueux de ce prince (le Duc de Bourgogne), qui est rempli d’ambition et désireux de s’acquérir de la réputation dans le monde[3]. »

Non moins grande, on pouvait le supposer, devait être la bonne volonté de Vendôme, pour reprendre 1 expression du Duc de Bourgogne, car jamais il n’avait eu pareille occasion d’ajouter quelque chose à sa gloire. Jamais il n’avait eu à sa disposition un aussi grand nombre d’hommes. L’armée de Flandre se composait de 206 escadrons et de 131 bataillons, divisés en 56 brigades. Elle comprenait les meilleures troupes de France, la maison du Roi, la gendarmerie, les carabiniers, le régiment des gardes, et comptait parmi ses chefs de corps des hommes qui

  1. Alison, The Life of John duke of Marlborough. t. I, p. 401. Lettre de Marlborough à Godolphin, du 12 juillet 1708.
  2. Archives d’Alcala. Lettre du 29 mai, communiquée par le P. Baudrillart.
  3. Coxe, Memoirs of John duke of Marlborough, t. II, p. 444.