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Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 13.djvu/226

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lumière et ce que certains naturalistes comme Frenzel, en 1891, ont vainement contesté.

L’étude que le savant belge avait faite sur les crustacés, un physiologiste français Ch. Contejean l’a exactement reproduite quelque temps après, sur le lézard et la sauterelle. Son travail, présenté à l’Académie des sciences la même année où Frenzel produisait ses vaines interprétations, y répondait indirectement. Exactement calqué sur celui de L. Frédericq, il en confirmait les conclusions. Le mécanisme se montrait assez général. L’amputation de la queue du lézard, celle des pattes sauteuses chez la sauterelle, comme celle de la pince du homard ou des pattes ambulatoires du tourteau sont soustraites à l’action de la volonté. Les unes et les autres sont des actes réflexes provoqués par l’excitation portée en un certain point des membres, mais faisant défaut si l’excitation n’a pas ce point de départ. Il faut que l’agresseur mette, en quelque sorte le doigt sur le bouton qui déclenche le mécanisme ; alors, celui-ci entre en jeu ; le membre se détache. Si l’on presse fortement sur la queue du lézard, sur la patte de la sauterelle ou du crustacé ; si on les entame et qu’on les blesse ; si c’est, par exemple, la mâchoire d’un carnassier, d’un animal de proie qui attaque le membre et en excite les nerfs, l’appareil réflexe fonctionne et le lézard, la sauterelle ou le crustacé s’enfuient laissant à l’ennemi le seul organe qu’il ait appréhendé. Mais, si la queue du lézard ou la patte du crustacé sont saisies avec précaution, et ménagement, et entourées d’un lien qui ne les presse pas trop fortement au début, l’animal restera prisonnier. Son ennemi pourra le tourmenter, le dévorer en détail, à la condition de respecter le membre captif ; celui-ci ne se détachera pas, et la bête subira jusqu’au bout son supplice.

Le caractère automatique et inintelligent du phénomène apparaît bien dans ces circonstances. Le lézard attaché par la queue peut être blessé ensuite ou brûlé en divers points du corps. Il cherchera vainement à se dégager. La cassure de la queue n’aura pas lieu alors qu’elle serait pourtant nécessaire au salut de l’animal : elle se produira, au contraire, dans des cas où elle lui sera entièrement inutile. En voici deux exemples : L. Frédericq fixe au moyen d’un emplâtre circulaire un lien à la base de la queue d’un lézard, aussi près du tronc que possible. L’animal retenu par cette sorte de collier, s’épuise en efforts infructueux pour s’échapper. La queue résiste. Mais, vient-on à s’attaquer à elle directement : vient-on à en pincer l’extrémité libre, l’organe se détache aussitôt par le mécanisme ordinaire. Mais alors, la