à celle d’aujourd’hui, — qu’elle ne semble au premier abord, puisque les distances, dans le Paris de Louis XVI, se trouvaient moitié moindres. Pour aller au Gros-Caillou, à l’Ecole militaire, la course était de 4 francs ; elle était de 4 fr. 80 pour aller à Vaugirard, Charonne ou Chaillot, et de 6 francs si l’on poussait jusqu’à Passy, « en gravissant la montagne des Bons-Hommes ; » ce qui, pour nous, correspond à traverser les jardins du Trocadéro jusqu’à l’angle des rues Franklin, de Passy et de la Tour.
Encore ces prix n’étaient-ils pas suffisans pour déterminer les fiacres à accepter des cliens à destinations si lointaines, puisque les ordonnances de police leur enjoignent de « conduire sans difficulté » les voyageurs en partance pour la Porte-Maillot ou les Invalides. Les « difficultés » du public avec les cochers ne datent pas d’hier, ils passaient déjà pour un peu épineux sous Louis XIV. Saint-Évremond se plaint de leur brutalité, de leur voix enrouée et effroyable, du bruit continuel que font leurs claquemens de fouet ; il plaint aussi leurs chevaux décharnés, qui mangent en marchant.
Ces véhicules si coûteux, au nombre d’environ 3 000, étaient pourtant le seul mode de locomotion que les Parisiens de la classe moyenne eussent à leur service sous le premier Empire ; les gens riches entretenaient à leur usage un chiffre à peu près égal de voitures particulières ; la petite bourgeoisie et le peuple allaient à pied.
Nul n’avait songé à leur fournir un mode de transport quelconque, depuis l’échec, au XVIIe siècle, des « carrosses quasi-omnibus » que le grand Pascal avait imaginés et dans lesquels, un jour, le Roi-Soleil avait daigné prendre place. Bien que de tels patronages dussent valoir à cette tentative l’attention de la postérité, les historiens ont rarement envisagé l’auteur des Pensées sous l’aspect de père des omnibus. L’entreprise des « carrosses à cinq sols, » dont il avait conçu le plan et fait en partie les frais avec sa sœur, Mme Périer, inaugurée quelques mois avant sa mort (1662), disparut au bout d’une vingtaine d’années, on ne saurait dire pour quelle cause.
Comme nos lignes modernes, ces premières voitures en commun partaient toutes les sept à huit minutes, « quelque petit nombre de personnes qui s’y trouvent, même à vide ; » de sorte que nul, disait l’affiche, n’aurait jamais à attendre le passage du carrosse public, en quelque lieu de la route que ce fût, plus