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Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 17.djvu/180

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Des savans distingués ont soutenu que, depuis l’ère chrétienne ou du moins depuis le moyen âge, le climat de l’Europe s’était refroidi ; mais ce changement est loin d’être prouvé. Quelques accidens locaux sans importance ont été généralisés à tort ; on a oublié que les caprices de la météorologie amènent souvent des séries d’années exceptionnelles qui encouragent le cultivateur à tenter des essais fatalement destinés à échouer à la suite de succès éphémères ; on ne s’est pas rappelé surtout que jadis la difficulté des communications rendait particulièrement avantageuses certaines cultures, et que l’appât d’un fort gain assuré dans les bonnes années décidait les agriculteurs à courir les risques d’organiser une plantation d’oliviers, par exemple, fréquemment improductive et vouée à la mort au bout de trente ou quarante ans, surtout alors que le terrain et la main-d’œuvre coûtaient fort peu et que le propriétaire savait et pouvait attendre l’arrivée de récoltes lucratives.

Excessif développement de la culture de la vigne, goût pour la cuisine à la graisse, construction du canal du Midi favorisant les rapports avec Toulouse, tels sont les motifs qui ont fait sacrifier les oliviers de Carcassonne. Ce sont les progrès du commerce qui ont chassé les mêmes arbres, de Saint-Péray vis-à-vis de Valence, jusqu’à la Voulte, qui marque actuellement l’extrême frontière nord de l’olivier sur la rive droite du Rhône, tandis que la rive gauche, moins favorisée, n’en nourrit qu’au sud de Montélimar. Encore, à la Voulte, les plantations régulières et productives se sont-elles fondues, ne laissant que quelques pieds isolés, abandonnés à eux-mêmes, qui subsistent comme témoignage d’un passé à jamais disparu.

L’hiver de 1709, si tristement célèbre dans les annales de notre histoire, fit périr un très grand nombre d’oliviers dans le Midi de la France. Qui sait si les désastres analogues qui survinrent pour la même cause en 1789 ne contribuèrent pas à aigrir les esprits ? Du moins, les fâcheuses gelées de 1820 et de 1829 n’amenèrent aucune crise politique ni économique trop grave. En semblable cas, on pourrait croire que le froid éprouve surtout les plantations des zones frontières de culture et fait alors reculer le domaine propre à l’olivier. C’est absolument inexact. Dans les territoires comme Nice ou Cannes, le froid n’atteint jamais une violence assez grande pour nuire à l’existence de l’arbre, et, à cause précisément de cette circonstance, le végétal