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M. Staley raconte d’abord l’enfance de Watteau, « Son père, nous dit-il, était un modeste couvreur (ces trois mots en français), c’est-à-dire un chaudronnier (coppersmith), ou peut-être, comme nous dirions à présent, un plombier (plumber). » Où l’on voit que l’auteur anglais aura dû confondre « couvreur » avec « cuivreur. » Il nous dit ensuite comment, « parmi les dessins de Watteau conservés à Valenciennes, se trouve une esquisse exécutée en 1697, à l’âge de treize ans, et qui a été gravée par L. Jacob. » Cette esquisse est intitulée : le Départ des Comédiens Italiens ; et M. Staley affirme qu’elle est « très précieuse au point de vue historique. » Car, nous dit-il, « c’est en 1697 que Louis XIV chassa de France les comédiens ambulans, parce qu’ils le caricaturaient, ainsi que Mme de Maintenon. » Il ajoute que u ces comédiens étaient extrêmement populaires dans tout le pays, » et que Watteau « fut d’autant plus désolé de leur départ qu’ils avaient été ses modèles favoris. »

Watteau, à treize ans, dans sa maison familiale de Valenciennes d’où il n’était jamais sorti, « se désolant » du départ de ces « comédiens ambulans » qu’étaient les comédiens italiens chassés par Louis XIV ; Watteau regrettant en eux, déjà, « ses modèles favoris, » et peignant une esquisse pour commémorer leur départ : que peut-on imaginer de plus amusant ? Sans compter que n’importe quel ouvrage français, depuis la Vie de Caylus jusqu’à l’excellent Watteau de M. Virgile Josz, aurait appris à M. Staley, — en supposant qu’une chose aussi évidente ait eu à être apprise, — que le Départ des Comédiens Italiens gravé par Jacob a été peint par Watteau à Paris, beaucoup plus tard, sans doute en 1716, lorsque le Régent a rappelé en France la troupe italienne.

Mais, du reste, M. Staley lui-même nous dit, à la page suivante, que ce n’est qu’en 1700 que « parut la première peinture de Watteau. » Cette peinture, La Vraie Gaieté, ne nous est connue que par une gravure d’un amateur, Le Hardy de Famars, qui, suivant l’usage du temps, a inscrit au bas de sa planche : « Dédié à Mademoiselle Le Hardy de Caumont. » Sur quoi l’auteur anglais de nous dire : « Le petit garçon (Watteau) dédia sa peinture à Mlle Le Hardy de Caumont, fille d’un collectionneur de Valenciennes, qui lui portait un immense intérêt. » Et il nous révèle que, l’année suivante, Antoine « acheva sa seconde grande peinture. Le Retour de Guingette, qui représente l’instant de la séparation dans un estaminet-buvette. »

A Paris, où le jeune Valenciennois arrive en 1702, il entre au service du peintre décorateur « Louis Métayer. » Voici ce que nous raconte à ce sujet son nouveau biographe :