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ni surtout des conséquences possibles, probables, de cet accaparement mesquin qui aurait servi de justification à d’autres accaparemens plus importons, opérés par d’autres que nous.

A mon sens, cette petite et délicate affaire, de Mytilène, mal présentée peut-être au public — mais qu’importe ! — a été conduite avec une très grande habileté par notre diplomatie, et exécutée par l’amiral Gaillard avec toute la rapidité, le tact, la prudence et l’énergie désirables.

Le coup frappé, l’effet produit, le dénouement atteint, il fallait quitter la scène et rentrer dans les coulisses, ainsi que nous avons fait en venant à Syra. Mais il semble inutile d’y demeurer longtemps, la pièce étant bien finie et le théâtre vidé.

Il faut rentrer chez soi.

Ce qui serait encore préférable, ce serait de profiter de notre présence en Orient pour circuler dans tous les ports, en Asie Mineure, en Syrie, et montrer à tous nos « cliens » le drapeau français, dont les trois couleurs se sont un moment posées sur Mytilène la Turque, aux portes mêmes des Dardanelles.

Mais, à Syra, malgré l’accueil touchant et flatteur que nous y recevons, nous sommes assez restés.


3 décembre 1901. — Syra (Grèce).

Syra, toujours Syra !

Depuis notre arrivée ici, nous sommes comblés, vraiment comblés d’attentions délicates, de politesses, de prévenances.

Le préfet, le maire et les membres du Cercle de l’Union ont mis à notre disposition leurs loges à l’Opéra italien ; plusieurs de nos compatriotes ont organisé pour nous d’agréables excursions en voiture ; un grand bal a été donné au Cercle en notre honneur ; des dîners, des thés, de petites matinées dansantes nous réunissent souvent chez notre consul, chez le consul d’Angleterre ou chez d’autres notabilités.

M. Georges Bambacari, l’agent des Messageries maritimes, sujet ottoman-catholique, jeune, mondain, élégant, très français d’esprit et de cœur, — cet « excellent Bambaca, » comme nous l’appelons, — nous sert de guide, de cicérone, d’introducteur dans les salons, et ne sait qu’imaginer pour nous être agréable. Syra est l’île de l’Archipel où l’élément catholique est le plus nombreux et l’attachement à la France le plus sincère. Les femmes y sont fort belles en général, la race grecque sur les