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des articles communs, des céréales ou des viandes abattues, pour lesquels nous ne pouvons lutter contre la concurrence des pays neufs. Ce sont surtout des produits fins et de luxe, pour lesquels notre pays doit sa supériorité soit à des qualités naturelles de sol et de climat, soit, comme le remarque très justement M. Périer, « aux aptitudes bien connues de notre paysan pour le travail méticuleux, pénible, peu rémunérateur, que développe chez lui à un haut degré l’appât de la petite propriété ; » et aussi aux aptitudes de notre paysanne, plus laborieuse, prenant une part plus active aux travaux agricoles que la femme des campagnes en aucun autre pays.

Nos ventes à l’Angleterre d’articles alimentaires et agricoles atteignent une valeur de 376 millions de francs, soit près de la moitié de l’ensemble de nos exportations de ce genre. Nos voisins du nord-ouest sont ainsi nos meilleurs cliens, aussi bien pour les produits dus aux conditions géologiques et climatériques de France, que pour ceux où ce sont les qualités de notre population rurale qui nous assurent la supériorité.

En tête des premiers, viennent les vins. En 1902, l’Angleterre nous en achète 239 000 hectolitres, pour 64 millions de francs : c’est le quart de tout ce que nous vendons ; c’est le tiers en volume et la moitié en valeur de tout ce qu’elle achète (747 000 hectolitres valant 125 millions). Une crise s’est malheureusement abattue sur cette branche si importante de notre commerce. La cause en est double : d’abord, la guerre du Transvaal, avec les deuils et les diminutions de revenu qu’elle a entraînés : le Champagne, qui représente les deux tiers (68 pour 100) de la valeur de nos ventes de vin en Angleterre, a vu son débouché réduit de 81 000 hectolitres en 1901 à 58 000 en 1902 ; les vins non mousseux en bouteille, c’est-à-dire les grands vins de Bordeaux et de Bourgogne, ont de même baissé de 19 000 à 10 000 hectolitres. Les vins en barrique, moins fins, ont à peine fléchi ; 182 000 hectolitres en 1898, 177 000 en 1902 ; mais leur valeur a baissé de 15 pour 100, tant par suite de la mévente des vins en France que parce que les Anglais, touchant moins de revenus, ont acheté du vin plus ordinaire. La seconde cause de baisse, c’est la concurrence des vins d’autres pays, du vin de porto qui a repris faveur, puis des vins coloniaux, australiens principalement. Tout médiocres, lourds et fades qu’ils soient, si j’en juge par les échantillons que j’ai bus en Australie même, il n’en a