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Océanie, ne sont pas moins dignes d’admiration ; ces dernières, entre autres, ont mérité un bel éloge de l’amiral Courbet.

Visitant un jour, l’école de jeunes filles de Saint-Louis, à Nouméa, tenue par elles, il accepta l’offre de la supérieure de faire faire la dictée à la première classe, et voici le texte qu’il improvisa : « Lorsque les missionnaires, dit-il, arrivèrent à la Nouvelle-Calédonie, il a fallu toute la persévérance et l’énergie que donne la confiance en Dieu pour leur faire affronter des périls continuels. Quelques-uns y ont perdu la vie, mais ils ont emporté en mourant la ferme espérance du triomphe de la civilisation chrétienne, que nous constatons aujourd’hui avec bonheur. » Il y eut plusieurs copies sans faute de jeunes filles indigènes. L’amiral, se tournant alors vers ses officiers, s’écria : « Que le député qui vient de déclarer à la Chambre que nos missionnaires n’enseignent pas le français vienne donc visiter leurs écoles, avant d’en parler ! » — On croirait ces lignes écrites d’hier, en réponse aux accusations d’autres députés, tout aussi mal informés.

Après cet hommage rendu par le héros de Fou-Tchéou aux écoles de nos missionnaires en Extrême-Orient, nous n’ajouterons plus que deux mots. Il est évident que la plupart des préjugés qui règnent contre les Missions étrangères sont nés de l’ignorance ou du parti pris. Les fautes commises par quelques-uns, et que nous n’avons pas dissimulées, — que le colonial qui est sans reproche leur jette le premier la pierre ! — ne sont qu’une quantité négligeable, auprès des services éclatans rendus par eux à la cause de la science, des bonnes mœurs et de l’humanité. Et nous avons le droit de dire, en retournant le mot cité plus haut : « Le plus sûr agent de civilisation, c’est le missionnaire ! »

Il y a plus : entre missionnaires et marins, entre résidens et négocians qui poursuivent là-bas, par-delà les mers, à l’ombre du drapeau tricolore, le même but civilisateur, bien que par des voies différentes, l’entente est facile, elle se fait toujours d’ailleurs à l’heure du danger. Ils n’ont qu’à se souvenir de la France, cette patrie de saint Vincent de Paul, d’Oberlin et de sœur Rosalie, et à se dire qu’elle n’a jamais été plus forte que lorsqu’elle était unie, ni plus glorieuse que lorsqu’elle faisait rayonner sur le monde, par les arts de la paix, son clair génie, fait de justice, de sympathie pour les opprimés, et de générosité !


GASTON BONET-MAURY.