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Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 21.djvu/398

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trop sentimentales ou trop tendres qui pourraient laisser croire que Didot-Saint-Léger avait quelques raisons de dire ce qu’il avançait, ainsi que celles qui rappellent les discussions entre les frères ou qui traitent de questions d’argent, sont accompagnées du mot : non ou inutile ; Aimé Martin ne voulait point les montrer.

Cette lecture n’influença pas les juges de la police correctionnelle qui, « considérant qu’il n’y avait pas lieu d’admettre la preuve des faits imputés, puisqu’il ne s’agissait pas d’un fonctionnaire public, et que le fait de diffamation et d’injure résultait d’un passage cité de la notice... » condamnèrent Aimé Martin à 300 francs d’amende, 1 000 francs de dommages-intérêts, et à la suppression du passage incriminé. Le perdant fit aussitôt appel, et, le 31 mai, la Cour, « écartant le fait de diffamation, » réduisait l’amende à 16 francs, les dommages et intérêts à 25, mais ordonnait la suppression du passage, qui, dans les éditions postérieures du volume, fut remplacé par des lignes de points. Didot-Saint-Léger, peu satisfait de cet arrêt, alla en Cassation, mais la Cour suprême rejeta son pourvoi et confirma purement et simplement l’arrêt des juges d’appel.

Le rôle de défenseur que s’était tracé Aimé Martin n’était pas terminé. En effet, la Biographie universelle publia un article sur Bernardin, où sa conduite était, là encore, sévèrement critiquée : les biographes, décidément, étaient durs pour l’auteur défunt. Aussi l’apologiste ordinaire de Bernardin prit-il de nouveau la plume pour présenter sa défense, et composa, en 1826, un Supplément à l’Essai sur la vie et les ouvrages de Bernardin de Saint-Pierre, renfermant r histoire de sa conduite pendant la Révolution, et de ses relations particulières avec Louis, Joseph et Napoléon Bonaparte (Paris, imprimerie de Tastu, in-8o). Il s’éleva vigoureusement contre les imposteurs qui se plaisaient à diffamer et à calomnier un homme dont la vie, disait-il, était irréprochable ; il parla avec un courage et une... partialité qu’il ne faut point méconnaître, et que l’on devrait presque louer : le second mari est généralement moins tendre à la mémoire de son prédécesseur !

Bernardin ne pouvait sortir indemne de toutes ces attaques ; aussi ses admirateurs et ses amis jugèrent-ils qu’ils avaient pendant longtemps encore à défendre sa mémoire, et, jusque vers 1860, ce fut une floraison de plaidoyers en sa faveur. En 1856,