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Talleyrand emmena Fouché à Saint-Denis pour qu’il prêtât serment au Roi. Ils entrèrent tous deux dans le cabinet de Louis XVIII, « le vice appuyé sur le bras du crime, » dit Chateaubriand avec l’emphase permise au génie. Le Roi, qui avait pris son parti, accueillit bien Fouché ; il parut même comprendre les idées de modération et de libéralisme respectueusement conseillés dans le projet de lettre que Fouché venait d’écrire et qu’il lui soumit. Mais il resta inébranlable sur la question du drapeau et celle de l’amnistie. Fouché d’ailleurs ne les avait abordées sans doute qu’avec une extrême discrétion, estimant moins hasardeux, pour cette première entrevue, de se tenir dans les généralités spéculatives. Le duc d’Otrante rentra à Paris sans avoir obtenu aucune concession d’intérêt public, mais il avait celle qui lui importait le plus, sa nomination de ministre.


III

Fouché avait donné aux royalistes la croyance qu’il était indispensable à la restauration de Louis XVIII. Tout n’était pas illusion dans cette opinion, comme le prétendirent plus tard, en s’accusant mutuellement de s’être laissé duper par le duc d’Otrante, ceux-là mêmes qui l’avaient soutenue avec le plus d’ardeur. Les événemens firent la Restauration de 1815 comme ils avaient fait la Restauration de 1814. Mais, de même que