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Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 24.djvu/761

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agir par eux-mêmes, afin de développer en eux l’aptitude à utiliser, dans la pratique de la vie, leurs connaissances théoriques…

« A la guerre, le fait a le pas sur l’idée ; l’action sur la parole ; la pratique sur la théorie…

« Entre ces deux termes : conception scientifique et art de commander, il y a un abîme, que la méthode d’enseignement doit faire franchir aux élèves, si elle veut mériter le nom de méthode pratique. On procédera par application…

« Plus tard et toujours avec l’assistance du professeur, l’élève s’exercera à appliquer son savoir à tous les cas fortuits pouvant se présenter dans le cours de sa carrière ; il arrivera ainsi à se servir d’une main sûre et habile de l’instrument dont il sera pourvu.

« Une éducation dirigée de cette façon a, en outre, au point de vue militaire, l’avantage inappréciable de tremper la volonté st par suite de conduire au but moral que poursuit l’Académie de guerre.

« Le sentiment de sécurité que donne le savoir, et la faculté de pouvoir, dans les circonstances les plus extraordinaires, se tirer d’affaire habilement et promptement, finissent par mettre les caractères, même faibles, en état de prendre, dans une conjoncture difficile, une décision ferme et d’en assurer l’exécution… »

« Plus l’expérience de la guerre fait défaut à une armée, plus il importe d’avoir recours à l’histoire de la guerre, comme instruction et comme base de cette instruction.

« Bien que l’histoire de la guerre ne soit nullement en état de remplacer l’expérience acquise, elle peut la préparer.

« En paix, elle devient le vrai moyen d’apprendre la guerre, de déterminer les principes fixes de l’art.

« Elle est indubitablement la source immédiate de toutes les connaissances utilisables à la guerre… »

De son côté, le maréchal de Moltke[1] a soumis à l’Empereur, en 1888, un programme d’études pour l’Académie de guerre. Maintenant la méthode de Peucker, il l’a perfectionnée en fondant plus fortement encore l’enseignement sur l’étude de cas concrets, extraits le plus souvent de la période napoléonienne ; sur les

  1. C’est à Moltke, alors major à l’état-major du IVe corps d’armée, qu’on doit l’invention du « Kriegspiel » — jeu de la guerre — permettant de conduire sur la carte une manœuvre à double action, dans des conditions de temps et d’espace analogues à celles d’une opération réelle.