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REVUE MUSICALE


THEATRE DE L’OPERA-COMIQUE : Hélène, poème lyrique en un acte, paroles et musique de M. Camille Saint-Saëns. — THEATRE DE L’OPERA : Daria, drame lyrique en deux actes ; paroles de MM. Adolphe Aderer et Armand Ephraïm, musique de M. Georges Marty. — CONCERTS-COLONNE : La Croisade des enfans, légende tirée du poème de M. Marcel Schwob ; musique de M. Gabriel Pierné.


N’ayant pas eu le prix de Rome autrefois, le plus grand de nos compositeurs s’est piqué de montrer qu’il aurait pu l’obtenir, et que même il ne lui serait point impossible de le remporter encore. Hélène est quelque chose comme la cantate, attardée et supérieure, de M. Saint-Saëns ; l’irréprochable « devoir » non pas d’un écolier, mais l’un maître.

Avec « la Belle » et « la Bonne, » ses deux homonymes et devancières, l’Hélène de M. Saint-Saëns poète et musicien a ceci de commun, qu’elle se donne ; elle se distingue en ceci de l’une et de l’autre, qu’elle ne se donne pas sans combats. Il ne faut rien moins, pour la jeter aux bras de Paris, que le conseil et presque l’ordre de Vénus sortie exprès des flots. Cypris ayant plaidé le pour, Pallas apparue à son tour plaide le contre, vainement. Elle a beau représenter aux amans, à leurs yeux non moins qu’à leurs oreilles (le décor illustrant la musique), les suites fatales de leur amour, la guerre de dix ans et l’incendie de Troie, les raisons que la raison ne connaît pas gardent l’avantage, et sur la mer couleur de violettes on voit une galère fleurie emporter l’un des premiers et des plus fameux entre les couples adultères, au bruit des chants et des baisers.

Si Vénus triomphe dans le poème, Pallas dans la musique est la plus forte. Un peu froide, souverainement sage et pure, cette musique