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le principe démocratique. Ces synodes seraient ce qu’est la seconde Chambre dans l’État. Je fis remarquer à l’archevêque que le jour d’un tel synode marquerait l’extinction de ses droits et de sa dignité, qu’il aurait à porter, outre les chaînes de l’État, la corde que lui mettraient au cou les ecclésiastiques radicaux.


Le malheureux Demeter avait compris le langage d’Hurter, et, mieux encore, le bref de Grégoire XVI contre l’agitation synodale, bref qui lui avait été transmis, à l’insu de la bureaucratie badoise, par le même Hurter, de la part de la nonciature de Suisse. Etrange époque, où un « évêque » protestant faisait à un archevêque catholique les commissions de Rome ! Mais Demeter, au lieu d’exercer son autorité disciplinaire di ! pasteur, avait demandé l’appui de l’État contre les prêtres réformistes ; l’État laissait écrire l’archevêque et laissait continuer les prêtres… À Schaffouse même, un ecclésiastique concubinaire nommé Fischer fondait une association pour développer dans le grand-duché l’agitation synodale ; et c’était, en 1845, le doyen même de Constance, Kuenzer, qui faisait voter par la Chambre badoise, conformément à une pétition d’ecclésiastiques, le rétablissement des synodes dans l’Eglise catholique. Quelques années auparavant, la Chambre wurtembergeoise avait émis un semblable vœu. La fermeté de Vicari, le nouvel archevêque de Fribourg, maintint ces turbulences en échec ; mais, pour que la question des synodes cessât d’être grosse de menaces, il fallait que les évêques allemands, tous ensemble, en fissent un examen sérieux, suivi d’une solution : c’est ce qu’ils accompliront en 1848 dans leur assemblée de Wurtzbourg.

Au fond de ces impétueuses aventures, il y avait autre chose et il y avait plus que l’inquiétude de tempérament qui sollicitait certains prêtres au mariage ; il y avait autre chose et il y avait plus qu’un certain libertinage de pensée, qui, transformant le ministre de Dieu en un simple éducateur populaire, répudiait la liturgie comme un attirail ; il y avait une question capitale, que la marche vertigineuse des événemens rendait urgente. L’opinion publique devenait tout dans l’État ; quelle pièce aurait-elle dans l’Eglise ? L’opinion publique extérieure à l’Eglise, c’est à-dire la représentation parlementaire, serait-elle admise à concerter le fonctionnement futur de l’institution religieuse ? Et l’opinion publique intérieure de l’Église, c’est-à-dire prêtres et laïques, serait-elle admise, périodiquement, à dire des mots