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mêmes « améliorations. » Les pacifistes se sont dépensés en discours et en brochures, en banquets et en toasts, en réunions publiques ou privées, et, avec infiniment d’adresse, ils se sont approprié, comme s’ils en étaient les auteurs, des résultats qui se sont produits tout à fait en dehors d’eux. Je voudrais entendre là-dessus quelque conversation de M. d’Estournelles avec M. Barrère ou M. Delcassé. Mais faisons-leur la partie belle ; admettons qu’ils soient les inspirateurs de 1er  u amélioration actuelle, » s’ils n’en sont pas les auteurs ; et demandons-leur, en ce cas, de nous donner quelque idée des moyens dont ils croient disposer pour résoudre « pacifiquement » les quatre ou cinq questions essentielles dont on pourrait dire que l’angoissante obscurité maintient l’Europe, depuis trente-cinq ans, sous le régime de la paix armée ?

Je ne parle pas au « péril jaune, » que le baron d’Estournelles, un des premiers, dénonçait ici même, il y a quelques années, et, en ce temps-là, je crois que c’était moi qui lui demandais de ne pas en exagérer la gravité. Pense-t-il aujourd’hui que ce soit par des « congrès de la paix » et des « traités d’arbitrage » qu’on puisse parer au « péril jaune ? » Je ne parle pas davantage du « péril américain » ou nord-américain : d’abord, parce que j’aime les Américains, et qu’à mon tempérament de « conservateur » je ne connais pas de régime politique ou social qui s’accommode mieux que celui de cette grande « démocratie. » Mais, cependant, contre qui nos pacifistes eux-mêmes prêchent-ils, si je puis ainsi dire, les États-Unis d’Europe ? et, en passant, n’est-ce pas un bel exemple des rivalités et des conflits qu’engendreront dans l’avenir les seules exigences de l’expansion économique ? et, si l’Ancien Monde, se sentant menacé dans son existence même par le Nouveau, se dresse quelque jour en ennemi contre lui, M. d’Estournelles se flatte-t-il qu’ils s’en remettront à lui de trouver entre eux un « terrain d’arbitrage ? » Mais je ne veux point poser les questions autrement qu’elles ne le sont pour l’heure, et je ne demande aux pacifistes que de me répondre sur trois ou quatre points.

Le fondement ou la condition du pouvoir politique de l’Angleterre, et même de son existence économique, c’est la maîtrise