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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



30 août.


La paix est faite ! La nouvelle nous en arrive au dernier moment ; le temps nous manque pour mettre tout à fait à jour les observations qui suivent. Elles n’ont plus, au moins partiellement, qu’un intérêt rétrospectif ; mais l’incertitude qu’elles témoignent sur le dénouement des négociations de Portsmouth servira du moins à montrer l’importance de la victoire diplomatique remportée par la Russie. Elle la doit au sang-froid et à la fermeté de son gouvernement, et aussi de son négociateur, M. Witte, qui a justifié les espérances qu’on avait mises en lui. Elle le doit encore davantage, s’il est possible, à M. le président Roosevelt, dont ce qu’on peut dire de mieux est qu’il a bien mérité de l’humanité. La paix ne se serait pas faite sans lui. Son caractère hardi, résolu, généreux, lui avait déjà attiré bien des sympathies : il en a singulièrement accru le nombre et la chaleur par les initiatives qu’il a prises au cours des négociations de Portsmouth. Lui seul peut-être était en situation de faire ce qu’il a fait, comme il la fait. Il a été en cela l’interprète éloquent, à la fois souple et fort, des sentimens de tous les peuples et de tous les gouvernemens. Ces sentimens cherchaient une voix ; il leur a donné la sienne. L’honneur en restera attaché à son nom.

Nous ne parlons pas ici en « pacifistes » doctrinaires : on sait bien que nous ne le sommes pas. Mais lorsqu’une guerre a déjà duré longtemps, sa continuation ne peut se justifier que s’il y a une espérance raisonnable d’en changer le cours. Cela peut toujours arriver sans doute ; la guerre est un jeu de hasard presque autant que de force ou d’adresse, et on a vu parfois se produire les retours de fortune les moins vraisemblables. Mais rien n’est plus rare, et jouer sur une carte