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le conseil des bâtimens civils et le service des monumens historiques fussent restés fidèles à leur mission en maintenant le bénéfice de leur tutelle à ces avenues dont le sol appartenait à l’Etat. Ils auraient dû, en tout cas, s’opposer à l’érection de bâtisses aussi attentatoires au caractère de Versailles que l’est le nouvel hôtel de ville, qui, à l’horizon du château, fait tache à la majestueuse beauté de l’avenue de Paris, ou bien encore que l’église, au clocher pseudo-gothique, récemment élevée à l’extrémité du boulevard du Roi. Il y a près d’un demi-siècle, un homme de goût, Ernest Bersot, avait écrit : « Il est des habitans de Versailles à qui manque un monument : naturellement un curé choisirait une église ; la municipalité rêve une mairie. » Cette prédiction s’est réalisée ; on a la mairie et l’église. Puisse Versailles ne plus « s’embellir » de la sorte !

Mais si, du côté de la ville, l’action de l’État est limitée, encore que les principales avenues de Versailles dussent être, comme le sont le Jeu de paume, les grandes et les petites Ecuries, classées comme monumens historiques, c’est surtout du côté des jardins, où rien n’y fait obstacle, que devrait s’imposer l’observation de règles conformes, en même temps qu’au bon goût, au respect d’un aussi beau domaine. L’entretien du parc n’est pas ce qu’il devrait être et le nombre des gardiens chargés de la surveillance de tous ces bosquets, de toutes ces œuvres d’art, est insuffisant. Les charmilles dépérissent et meurent, faute de soins, et ne sont pas renouvelées ; les treillages, qui protégeaient les bosquets, sont détruits ; les statues et les œuvres d’art, même les plus belles, reçoivent de grossières atteintes.

Ne pourrait-on pas, si l’insuffisance des crédits s’oppose à l’augmentation de l’effectif des gardiens, détacher de la nombreuse garnison de Versailles, ainsi que cela avait lieu autrefois, quelques escouades pour aider à ce service de surveillance ? De l’héritage artistique du passé il ne faut laisser disparaître rien de ce qui existe encore. Sur ce point doit aussi porter l’œuvre de conservation et de restauration heureusement entreprise. Que dans cette œuvre, à laquelle les architectes qui se sont succédé à Versailles, MM. Questel, Guillaume, Albert Leclerc et surtout, depuis 1889, M. Marcel Lambert, ont consacré de laborieux et artistiques efforts, il se soit produit quelques erreurs, — que pour certains bronzes, on n’ait pas suffisamment respecté la patine du temps, il faut le regretter ; mais, on doit aussi le dire très haut,