Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 31.djvu/123

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec des torpilleurs. Le crédit total à ma disposition, quinze millions de yens ou dollars argent, sur lequel il fallut prélever l’achèvement d’anciens navires à Yokoska, l’achat de seize torpilleurs, la construction ou la commande de trois éclaireurs dont le Yayé-yama et de cinq petites canonnières, enfin l’achat du terrain et le commencement des travaux pour les deux arsenaux de Kré et de Sacébo, n’aurait guère permis de songer à des cuirassés de 14 000 tonnes, La solution des canonnières cuirassées, françaises ou allemandes, convenablement améliorées, mais toujours sans vitesse ni charbon, était admissible pour la défense de la mer intérieure et des grandes rades du Japon ; elle fut étudiée à Yokoska. La solution différente, adoptée en conservant le nom de gardes-côtes, a permis d’aller garder, la côte ennemie. Le Japon s’en est bien trouvé.

Les officiers japonais ne se préoccupèrent nullement du nom de leurs navires, mais ils furent frappés de la nouveauté du système défensif et soucieux de ses conséquences pour la manœuvre et la tactique. Ils me prièrent de leur faire à cet égard quelques conférences au cercle de la Marine, ce que j’acceptai d’autant plus volontiers que leur désir répondait à mes préoccupations et qu’il me suffisait, pour y satisfaire, de développer les considérans de ma première note de 1872. L’affluence dans la salle habituellement déserte de Sé-i-Kosia témoigna du zèle des officiers pour leur métier. Deux séances suffirent pour prémunir contre le danger de l’ordre d’attaque en pointe, classique et même renouvelé des Grecs, avec les croisemens qui en résultent. La tranche cellulaire n’est efficace que dans le combat du travers ; elle suppose la faculté d’écraser l’adversaire par un feu commencé à bonne portée et régulièrement soutenu, en maintenant autant que possible la distance constante. La tactique du combat du travers par des évolutions en ordre de file avait été prévue d’ailleurs et se trouvait matériellement imposée par la position donnée au canon de perforation du Matsou-sima.

Le Matsou-sima, l’ltsoukou-sima, le Hasidaté ont fait d’excellente besogne à la bataille du Yalou, et donné lieu à quelques critiques irréfléchies. Il est arrivé à la tranche cellulaire d’être traversée, mais le pont blindé n’a pas été directement touché. Un malencontreux projectile, éclatant au-dessus d’un panneau, a blessé un chauffeur devant les feux. Un autre, plus funeste, a fait exploser, dans la batterie du Matsou-sima, tout un lot de