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leurs tranchées. Les soldats s’y trouvaient quelquefois sur deux rangs, donnant ainsi prise à l’action des shrapnells. Cette passion des positions s’est partout manifestée. A la bataille de Lyao-Yang, le général Kouropatkine tenait la victoire dans sa main. L’armée de Kouroki était épuisée. Les Russes avaient de très fortes réserves intactes. Il suffisait de les mener à l’attaque. La déroute de la division Orloff n’était qu’un épisode de bataille. Le commandement russe s’est-il laissé influencer par cet incident ? En tous cas, au lieu d’attaquer, l’armée a été reportée sur des positions organisées en arrière. Il est inutile d’entrer dans plus de détails. La tactique russe ne peut nous donner aucun enseignement. Du côté japonais, c’est autre chose.

Nous avons vu que la prise de contact éloignée se faisait au moyen de reconnaissances d’officiers, généralement accompagnés de quelques cavaliers. Mais la zone d’exploration est préalablement fouillée par des espions. Un rapport russe, en date du 21 juillet-3 août 1904, s’exprime ainsi : « En avant des troupes, marchent toujours des Chinois qui fouillent le terrain avec le plus grand soin, car la moindre négligence les expose à une mort immédiate.

« A cet effet, dans les villages, les Japonais enlèvent aux familles chinoises le père et les fils. Ils gardent le père comme otage tandis qu’ils envoient les fils espionner. Généralement, ils envoient deux frères dans la même direction, mais à différens momens, pour contrôler à leur retour les renseignemens de l’un par l’autre. En cas de désaccord, leur père est mis à mort. Dans toute la zone d’approche de l’adversaire, un réseau d’espions du pays est déployé. Ils ont pour mission de suivre tous les mouvemens des Russes. La mort punit non seulement la trahison mais encore un renseignement inexact. Derrière les espions, viennent de petites patrouilles de cavalerie doublées par de l’infanterie. C’est ainsi que, pour trois ou quatre cavaliers, il y a toujours quatre ou cinq fantassins. Quand les cavaliers prennent le trot, leurs ombres (soldats d’infanterie) courent derrière eux. Après les patrouilles viennent les détachemens de tête, puis les troupes formées en petites colonnes, avec de grands intervalles entre elles. Ordinairement la cavalerie ne marche pas en avant de l’infanterie, mais en arrière des détachemens de tête. Elle sert à couvrir l'artillerie en avant et sur les flancs. Quand un déta-