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un voyage à sparte.



Olympie fut la dernière étape de mon excursion. C’est là que j’ai pris ma plus claire idée de la Grèce ancienne. J’ai vu les cités comme autant de haras qui venaient éprouver sur le stade la forme de leurs produits.

La Grèce fut un groupement de petites sociétés pour l’amélioration de la race hellénique. Et ce culte de la race, s’il nous donne le secret d’une énergie et d’une aristocratie incomparables, nous explique aussi la décadence.

Les meilleures précautions imaginées pour protéger et améliorer l’espèce dans chacun de ces petits cantons devaient cependant l’appauvrir. Le souci de garder la pureté ethnique est à la fois sagesse et démence. Un peuple produit alors une sécrétion qui lui est propre ; mais très vite il s’épuise. Les guerres, les massacres des partis, l’affranchissement des esclaves, les émigrations avaient raréfié le sang grec, quand le flot barbare submergea les Acropoles.

Mais c’est une grande force qu’un beau nom ; il stimule l’âme et dirige l’imagination. J’éprouve beaucoup de respect pour les peuplades qui habitent encore le sol vénérable de la Grèce. À toutes les minutes de leur vie publique et privée, ces héritiers se flattent de sentir dans leurs veines la vertu des héros. Est-ce une exagération ? Je ne me permets pas d’en décider. Si le vieil arbre rejette d’authentiques pousses, nous le verrons bien aux fruits. Si le petit royaume mi-allemand, mi-français, mi-turc est une véritable Grèce, les sceptiques seront confondus quand Phidias construira un nouveau Parthénon, quand Sophocle nous redonnera une Antigone et que la raison de Thucydide illuminera la pensée de M. Jean Psichari.

Je penche à croire que ça ne tardera guère. D’une manière générale, en 1900, les enfans au-dessous de sept ans étaient délicieux de flamme et de bonne grâce. Devenus grands, ils ne seront pas gênés de manifester avec force leurs mérites, car leurs pères, avec un génie commercial dont nul voyageur ne doute, ont dû leur amasser, sans en avoir l’air, de l’indépendance et de la fierté.

Au reste, qu’on ne me soupçonne pas de parler légèrement des Athéniens modernes. Aucun patriote et même aucun homme imaginatif ne peut être insensible au zèle religieux qu’ils veu-