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cite serait avec mes tantes : car, pour l’Espagne, on n’y peut songer d’aucune façon.

« Si l’évêque me demande mes ordres pour faire ou ne pas faire, je lui répondrai : 1° de ne faire dans aucun cas aucune mention de Son Altesse Royale Marie-Thérèse de Savoie ; 2° si, après avoir tâté le terrain, il est certain que cette négociation ne nuira pas à celle du mariage, et vice versa, de s’assurer, que dans un cas de nécessité urgente, la cour de Vienne fermera les yeux sur le séjour provisoire de Mme la marquise de Maisons à Vérone, Vicence, Padoue ou Venise : c’est là tout ce qu’il m’est possible de faire. »

Quelques semaines plus tard, un incident d’ordre non moins intime que le précédent fournit encore au Roi un prétexte à observations et à blâme. Il s’agissait de donner un aide de camp au Duc de Berry, qui allait rejoindre en Wolhynie l’armée de Condé. Le Roi avait proposé à son frère de désigner pour cet emploi M. de Sourdis, neveu du comte d’Avaray. Monsieur ne tint aucun compte de cette recommandation. Il nomma M. de Nantouillet, neveu du comte de Duras, et c’est au Roi lui-même qu’il demanda d’apprendre au Duc de Berry le choix qu’il avait fait. Le Roi fut tout mortifié de son échec auquel d’Avaray ne fut pas moins sensible que lui.

« Je regarde la communication entre père et enfans comme une chose sacrée, mandait-il à son frère, et j’ai religieusement rempli la commission que vous m’aviez donnée. Mais je vous dirai tout franchement que je suis profondément affecté du choix que vous avez fait de l’aide de camp du Duc de Berry, si toutefois il ne peut en avoir qu’un. M. de Nantouillet est un bon sujet ; son mérite peut faire oublier sa naissance, j’en conviens : mais vous devez vous rappeler que vous ne l’aviez pas donné à votre fils dans l’origine, que vous aviez seulement permis qu’il fût auprès de son oncle. Ainsi, vous n’étiez pas lié à son égard, et s’il est neveu du comte de Duras, M. de Sourdis, aussi bon sujet que lui et d’une tout autre espèce, est beau-frère de d’Avaray. Vous savez ce que ce titre est pour moi et j’aime à me persuader qu’il est quelque chose pour vous, surtout au moment du mariage de nos enfans. Avez-vous oublié d’ailleurs, mon ami, l’engagement que vous avez pris vis-à-vis de votre fils et de M. de Sourdis lui-même ? »

Ainsi, toujours et en tout, Louis XVIII parle net et franc.