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intégrale du chlore et fait connaître par-là la dose de chlorure décomposé. Enfin les appareils servant à titrer la richesse des liquides résiduels en glycérine, problème assez complexe à résoudre. Celui que la chimie ne séduit pas contemplera avec plus d’intérêt la série des aromates destinés à imprégner les savons de toilette : tantôt ces principes se retirent des plantes : lavande, géranium, aspic, verveine, romarin ; tantôt, et c’est le cas le plus fréquent, ils ont pris naissance dans les usines, comme l’essence d’amandes amères et bien d’autres.

Le laboratoire donne dans la salle des chaudières : il y en a huit, contenant chacune 600 000 litres. Inutile de s’appesantir sur le sort qu’éprouverait un maladroit qui se laisserait choir au sein de cette masse bouillonnante, d’où s’échappent des torrens d’acide carbonique : l’alcali chaud décomposerait immédiatement ses chairs et seuls les os subsisteraient intacts. Comme presque toutes les phases de l’opération se poursuivent à l’intérieur de la même chaudière, le volume de celle-ci, quoique proportionné à celui du savon à créer, doit être bien supérieur (le triple environ), ce qui n’empêche pas chacun de ces récipiens de pouvoir dégorger 25 à 30 000 litres de savon. Du reste, le volume de la chaudière peut être artificiellement accru au moyen de hausses mobiles ou rallonges, et, tant pour éviter les accidens que pour simplifier la manœuvre, ce sont des tuyaux convenablement disposés qui vomissent à l’intérieur des chaudières tour à tour l’huile et les lessives. Celles-ci proviennent des soudes dites Solvay, presque pures, contenues dans des sacs amoncelés dans la même salle, et l’usine les caustifie sur place à l’aide de vulgaire chaux qui cependant laisse encore subsister une médiocre proportion d’acide carbonique, lequel, comme nous l’avons indiqué, se dégage pendant la cuisson.

En somme, salle propre, largement balayée par les courans d’air, odeur point désagréable ; partout, des bacs métalliques, des conduites souterraines dont les pieds des visiteurs perçoivent la chaleur, des tuyaux aériens d’où s’échappent des cascades de liquides alcalins. Naturellement les chaudières alignées occupent le centre de l’immense pièce et, dans les coins, on distingue des bassins ou « barquieux » remplis de lessives ayant déjà servi et prêtes à fonctionner de nouveau en changeant de rôle.

Nous avons dit et répété qu’autrefois le savon prenait naissance par le moyen d’une sorte de cuisine empirique fort