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« Les démarches que j’aurai à faire auprès du gouvernement britannique, pour annoncer mon voyage et assurer mon retour, seront si faciles, à ce que j’espère, que j’attendrai pour les faire que vous m’ayez communiqué les réponses que vous recevrez de Berlin à mon égard. Je voudrais pouvoir écarter de mon esprit jusqu’à la possibilité de vous voir éprouver un refus de la part du roi de Prusse ; mais enfin, si malheureusement cela arrivait, croyez, mon ami, que je serais aussi sévèrement puni que vous, et qu’en reprenant forcément mon ancien projet, le bonheur que j’éprouverais en me retrouvant avec mes enfans serait beaucoup altéré. »

Sans attendre la réponse qu’on vient de lire et qui allait, comme il disait, « mettre du baume dans son sang, » le Roi, dès le 1er mars, commençait à Berlin des démarches à l’effet d’obtenir pour son frère l’autorisation de venir à Varsovie et, le 25, il lui annonçait que ses démarches avaient abouti.

« La poste m’a apporté aujourd’hui le remède à un mal qui me tient depuis le 17 novembre 1793[1], le consentement le plus gracieux à votre venue ici. Vous parler du bonheur que j’éprouve, ce serait envoyer de l’eau à la rivière. Venons aux détails d’exécution de ce qui, grâces à Dieu, n’est plus en espérances. Strict incognito, simplicité en icelui. Vous savez, mon ami, que c’est à ces deux conditions fidèlement observées de ma part que je dois la tranquillité dont je jouis et la joie dont mon âme est remplie en ce moment. Ainsi, 1° vous vous appellerez le comte de X…, le marquis de X…, comme il vous plaira, hors votre véritable nom ; 2° il faudra n’amener qu’une ou, tout au plus, deux personnes de votre suite ; pour les valets, je n’ai pas besoin de vous en parler, je connais votre manière leste de voyager. »

Quelques jours plus tard, il confirme gaîment cette lettre : « Toutes les autres n’ont été que du pelotage ; c’est le 25 mars que la partie a commencé et je dis d’une jolie manière. Aussi, j’espère que vous aurez été content de mon service et que vous me renverrez la balle sur ma raquette. J’espère bien plus, car j’espère que, désormais, mes lettres ne vous arriveront plus qu’après avoir couru après vous. »

Dans la même lettre, à propos de l’expédition entreprise par Bonaparte contre les noirs qui se sont révoltés, reparaît le Roi

  1. Date de leur séparation à Hamm, depuis laquelle ils ne s’étaient pas revus.