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disparaître les causes de division et cimenté l’union que ces malheurs rendaient plus impérieusement nécessaire. Les princes d’Orléans eux-mêmes, dont la soumission ne datait que de 1800, venaient de prouver combien elle était sincère en s’associant aux protestations publiques qu’avaient dictées au Roi les circonstances. Il rendait hommage à la noblesse de leur conduite et il semblait bien que le lien renoué avec eux fût devenu indissoluble.

Mais c’est surtout la confiance entièrement rétablie entre son frère et lui qui le comblait de joie. Leurs ennemis avaient mis tant de perfidie à exploiter leurs discordes en les exagérant, que la cause royale en avait souffert. Elle retrouvait de la force dans un franc retour à l’union et à l’entente, et cette force se recouvrait d’autant plus à propos que le Roi rêvait déjà d’opposer à la proclamation de l’Empire une protestation solennelle dont il ne voulait arrêter les termes qu’après en avoir conféré verbalement avec tous les princes de sa maison, réunis autour de lui.

Où aurait lieu cette réunion, il n’en gavait rien encore. Mais, comme ce ne pouvait être à Varsovie où le roi de Prusse ne l’aurait pas tolérée, il tournait les yeux vers la Suède ou la Russie. Il connaissait l’ardent dévouement du souverain suédois, et il croyait encore à celui de l’empereur Alexandre. Il ouvrait avec ces deux princes des négociations dont sa correspondance avec son frère nous permettra de suivre ultérieurement la marche. On sait qu’elles aboutirent à la rencontre de Louis XVIII et du Comte d’Artois à Calmar en Suède, au mois de septembre 1804. C’est là qu’ils se revirent après une séparation qui n’avait pas duré moins de onze ans.


ERNEST DAUDET.