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qui succéda à lord Hardinge, le roi de Lahore était détrôné et le Moultan et le Pendjab définitivement annexés. En 1856, avait lieu l’annexion du royaume d’Aoudh. Aucune région indépendante ne se trouva plus interposée dès lors entre l’Afghanistan et l’Inde anglaise qui devint contiguë à l’Ouest et au Sud avec ce pays. Treize ans avaient suffi pour mener à bien cette besogne.

Et alors le moment fut jugé opportun d’entrer en conversation avec l’émir afghan Dost-Mohammed, qui était encore sur le trône où les Anglais l’avaient laissé remonter et qui, ayant repris ses premiers bons sentimens à leur égard, ne demandait qu’à s’y prêter et cherchait d’ailleurs à réaliser par lui-même ce que le gouvernement de l’Inde avait voulu faire par ses propres forces : un État afghan unifié à l’intérieur et fort au dehors. Déjà, en 1850, il avait repris Balk et raffermi son autorité sur le Turkestan afghan et dans le bassin de l’Oxus. Il convoitait Hérat, et était inquiet des prétentions de la Perse sur cette ville. On tomba facilement d’accord, et, par le traité de Peïchawer (30 mars 1855), il fut stipulé qu’entre « l’Honorable Compagnie des Indes et Sa Hautesse l’émir Dost-Mohammed-Khan, vali de Caboul, il y aurait paix et amitié perpétuelles ; que la Compagnie des Indes s’engageait à respecter les territoires de Sa Hautesse, à n’y jamais intervenir et à être l’ami des amis et l’ennemi des ennemis de ladite Compagnie. » Deux ans après, une nouvelle convention, par laquelle le gouvernement de l’Inde consentait à accorder son appui à Dost-Mohammed dans ses démêlés avec la Perse, acheva la réconciliation. Fort de cette amitié, Dost-Mohammed put rentrer en possession de Candahar et s’empara en 1862 de Hérat. Après sa mort, la même amitié fut continuée à son fils et successeur Shere-Ali, auquel furent fournis des armes, de l’artillerie et trois millions par le traité d’Ambala en 1869.

Cependant, tandis que les Anglais poussaient leurs frontières jusqu’au front Sud et Ouest du plateau afghan et cherchaient à faire graviter ce pays dans l’orbite de l’empire des Indes, les Russes ne demeuraient pas inactifs. Eux aussi avaient compris après l’échec de la mission Vitkevich, en 1839, qu’il était vain de vouloir faire une politique active en Afghanistan, alors que leurs possessions de Sibérie et d’Europe étaient séparées par des centaines de lieues de ce pays. En 1840, les postes russes les plus avancés en Asie centrale étaient sur le Syr-Daria et l’Irtych. Dès 1845, les Kirghiz étaient soumis et des expéditions dirigées