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il y a cinq ans, et qui ont grandi pour se désennuyer. Je ne sais si je me mettrai à travailler avec zèle. J’en ai un peu perdu l’habitude, et les motifs qui m’encourageaient au travail jadis ont un peu diminué. Cependant comme c’est encore ce qu’il y a de mieux à faire, à moins qu’on ne veuille faire pis, ce qui est une autre espèce de mieux, je tacherai de m’imaginer que j’y mets de l’intérêt.

Vous me parlez de mon Polythéisme : je l’avais assez avancé l’été dernier. Depuis trois mois, je ne m’en suis plus occupé. J’ai entrepris, par complaisance pour Laborie, je ne sais quels articles dans je ne sais quel Dictionnaire, sur lequel je n’ai plus de données exactes, et il me paraît, par un prospectus que j’ai vu, qu’on a changé sur ce que l’on exige de moi.

Adieu, cher Prosper. J’attends avec impatience la nouvelle édition de votre XVIIIe siècle. Vous n’aviez pas besoin de vos concurrens pour relever ce qu’il y a de beau dans votre ouvrage : mais ils y font ce qu’ils peuvent.

Je vous embrasse mille et mille fois. Je ne vous dis pas de me répondre. Votre lettre ne me trouverait plus ici.


XX


Des Herbages, ce 29 mai 1810.

J’ai été bien longtems sans répondre à votre bonne et aimable lettre, cher Prosper. Mille raisons m’en ont empêché, et il est encore de la nature de ces raisons de faire que je ne vous les détaille pas à présent. Mais je viens de lire votre admirable histoire de la Vendée, et je ne puis tarder à vous en écrire. Vous devez vous trouver heureux d’avoir ainsi consacré les plus glorieux, je dirais presque les seuls glorieux souvenirs de notre longue, sanglante et inutile révolution. Je ne connais rien qui soit d’un intérêt pareil. Nous en causerons mieux encore quand je vous verrai. Qu’il me soit seulement permis de vous dire que dans cette lecture l’estime et l’admiration se partagent entre les héros et l’historien.

Je voudrais que votre exemple pût m’animer et me donner le courage de travailler à quelque entreprise de longue haleine. Mon Polythéisme serait bien ce qu’il faudrait, mais je n’en ai guère le loisir, et indépendamment de mille autres choses, mes articles coupent mon tems et me désespèrent. J’en ai cependant