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améliorations apportées à la position des sous-officiers ont eu pour résultat d’enrayer le mouvement, là s’est bornée leur influence.

« On peut espérer, il est vrai, que l’application progressive de ces améliorations amènera peu à peu un plus grand nombre de sujets à se destiner au métier de sous-officier, tandis que la diminution des salaires agira dans le même sens. Nous sommes persuadés qu’il faudra d’autres moyens encore pour donner au corps des sous-officiers non seulement le nombre de sujets nécessaires, mais encore des sujets qui soient à hauteur des exigences actuelles. En réalité, c’est encore la qualité plus que le nombre qui fait défaut dans notre corps de sous-officiers.

« La tactique moderne exige que le soldat ait une bonne instruction individuelle. Or, dans une armée qui incorpore des jeunes gens appartenant à toutes les classes d’une nation où l’instruction est très répandue et qui est obligée de les exercer rapidement en raison du temps du service légal relativement court, on ne saurait atteindre les résultats désirables si les sous-officiers sortent pour la plus grande partie de la classe ouvrière. Il faudra faire plus encore pour attirer, dans les rangs des sous-officiers, les meilleurs élémens de la bourgeoisie et de la population des campagnes. On y arrivera, selon nous, non pas en augmentant la solde, qui est suffisante et en rapport avec les habitudes que doit avoir un sous-officier, mais bien en assurant son avenir. »

Ces vues sur une situation qui ne s’est que peu modifiée, dans ses grandes lignes, sont très instructives. Elles montrent qu’en appliquant la méthode adoptée en Allemagne et copiée, avec des tempéramens plus ou moins heureux, par tous les autres pays, le recrutement des cadres est lié aux fluctuations des conditions économiques ; que l’on arrive ainsi à souhaiter, pour le faciliter, la diminution des salaires. Souhait inhumain d’une part et mal avisé de l’autre, même au point de vue militaire, puisqu’en général, il correspond à une diminution de la richesse publique et par suite des ressources que le pays peut mettre en œuvre pour sa défense.

Quoi qu’il en soit, si des crises passagères peuvent faire de ce vœu une réalité momentanée, la marche constante du progrès économique et l’augmentation incessante du bien-être matériel le rendent le plus souvent chimérique.