Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 34.djvu/677

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Bassa des Scudéri, 1616 ; leur Artamène, 1648 ; combien d’autres romans encore, dont la vogue a pour le moins égalé celle de la Rome ridicule, ou de. toutes les Scarronades ! Et, quant au théâtre, pour ne nous en tenir qu’au seul Corneille, qui ne sait que ses chefs-d’œuvre : Horace, Cinna, Polyeucte, le Menteur, la Mort de Pompée, la Suite du Menteur, Rodogune, Héraclius, don Sanche, Nicomède ont vu le jour précisément de 1640 à 1650 ? Le burlesque, reconnaissons-le donc, — et on va voir tout à l’heure l’importance de l’observation, — n’a vraiment éclipsé, même au temps de sa plus grande faveur, ni le « romanesque » ni r « héroïque. » On n’a pas du tout fait mine de délaisser Corneille ou Mlle de Scudéri pour Scarron. Que dis-je ? Il ne semble pas que la popularité du burlesque ait nui à la fortune de la littérature même « théologique ; » et ceci est un trait trop oublié de la physionomie du XVIIe siècle, dans sa première moitié, que, — pour l’abondance de la production, et sans doute, et par suite, pour la diffusion de la vente, — le « théologique, » à lui tout seul, égale ou même dépasse le burlesque, le romanesque et l’héroïque joints ensemble.

Ce qui demeure pourtant vrai des observations de M. Morillot, c’est que le burlesque, s’il n’a pas régné, a du moins « sévi, » pendant vingt-cinq ou trente ans, avec une intensité singulière ; et il est naturel qu’on veuille chercher les raisons. Il y en a plusieurs, dont on pourrait dire que la première est justement le contraire d’une raison « nationale, » si elle n’est autre que la manie d’imitation qui caractérise l’époque où s’est développé le « burlesque. »

Comment se fait-il, à ce propos, que ce chapitre, si important, de notre histoire littéraire, soit encore à écrire ? et qu’au début du XXe siècle, nous ne sachions toujours que d’une manière vague et approximative ce qu’il nous faut penser de l’influence des littératures italienne et espagnole sur la nôtre, — entre Malherbe, qui n’a pu, quoique l’ayant voulu, complètement s’y soustraire, et Boileau, qui les refoulera par delà leurs Alpes ou leurs Pyrénées ? Ce ne sont pas ici les détails qui nous manquent, ou les preuves, mais une vue d’ensemble et des « précisions » chronologiques. Peu sensibles en effet pendant le règne d’Henri IV, — s’il n’y a certes rien de plus « français » ou de plus « national, » c’est le cas d’employer le mot, que les Essais de Montaigne, les écrits un peu lourds de Du Vair, la Sagesse de Pierre