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déduire des frais environ 27 millions de subventions à des compagnies postales de navigation et à des câbles télégraphiques sous-marins ; mais, tout au moins pour une partie, ce sont bien là des frais d’exploitation, dont on ne saurait se passer. On ajoutera que l’État a, comme bénéfice net, la franchise de ses télégrammes et de ses propres correspondances, et cela est exact ; mais, d’autre part, il ne paie directement aucune redevance aux Compagnies de chemins de fer pour les transports postaux, et il subit indirectement les frais de cette gratuité apparente, soit par le grossissement des garanties d’intérêts à sa charge, soit par le retard ou l’amoindrissement de sa participation aux bénéfices des Compagnies. Tout considéré, contrairement à l’opinion publique, en tenant compte de tous les élémens, le service des postes et des télégraphes se fait en France presque au prix coûtant ; ce service public, avec les tarifs actuels, ne rapporte rien ou quasi rien à l’Etat ; il serait important que l’on se rendît compte de cette vérité ; cela couperait court à beaucoup d’entraînemens ; elle ressortirait encore avec plus d’éclat si l’on défalquait de cette administration complexe la branche des téléphones qui, elle, paraît être en bénéfice net d’une douzaine de millions

On trouvera peut-être que nous nous sommes étendu avec trop de complaisance sur les impositions nouvelles et les dégrévemens effectués depuis trente-six ans dans les diverses branches des administrations fiscales. Il était indispensable de le faire pour montrer ce travail persistant de rétrécissement graduel de la base des impôts, d’immunités de plus en plus larges allouées à la masse, et de concentration du poids des taxes sur un nombre de plus en plus restreint de contribuables.

Avec la disparition ou l’atténuation des principaux impôts indirects, auxquels on substitue de plus en plus des taxes portant principalement sur « la richesse acquise, » les finances françaises ont perdu à la fois en solidité et en élasticité. Cet amoindrissement de l’élasticité devient chaque jour plus visible, aussi bien pour les finances locales que pour les finances nationales. Cela n’empêche pas que nombre de politiciens, attardés ou étourdis, non seulement veulent continuer ce mouvement de déplacement du poids des taxes, mais prétendent même l’accélérer, au risque de rendre quasi paralytiques les finances françaises, au point que, complètement anémiées et sans ressort, elles ne pourraient plus soutenir nos écrasans budgets.