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gros de troupes s’approchait et que ses corps s’étendaient de Genji à la hauteur de Chetpet ou Settipettou. C’étaient, en effet, sept cents Français et Suisses accrus d’un nombre double de cipayes, que M. de Leyrit, gouverneur de Pondicliéry, acheminait vers le refuge de Mortiz-Ali, non sans avoir averti le gouverneur de Madras qu’il tiendrait la moindre entreprise contre Vellore pour une infraction au traité de paix.

Les Anglais ne s’engagèrent pas plus avant. Mais ils surent si bien manœuvrer et parlementer qu’ils obtinrent de Mortiz-Ali, trop heureux de s’en tirer à ce prix, quatre cent mille roupies, près d’un million et demi de notre monnaie. Ayant ainsi couvert leurs frais de mise en route, ils retournèrent à Madras sans renoncer à l’espoir d’une entreprise plus profitable. Le nabab honoraire ne s’attendait pas à renvoyer ses formidables ennemis à si bon compte. Et, pour tout dire, sa méfiance se partageait entre ses ennemis et ses amis, d’une manière égale. Malgré les bonnes paroles dont l’honora M. de Leyrit par voie de courrier, Mortiz-Ali se refusa à laisser pénétrer un seul Français dans sa citadelle. Sachant de reste qu’avec les hommes de l’Occident un Hindou n’était jamais sûr de rester maître dans sa maison, quand il en avait ouvert la porte, il tint ses battans à bossettes de fer hermétiquement clos et demeura, à l’abri de son mur à frise sculptée, sous la garde de ses crocodiles, nourris avec les criminels qu’on leur jetait de temps à autre.

Mortiz-Ali devait jouir en propriétaire paisible de sa forteresse, pendant sept années encore. Puis l’inlassable Mohammed-Ali revint à la charge avec ses amis les Anglais. Et, en 1763, Vellore tomba entre leurs mains après un siège de trois mois.

Les Anglais ne lâcheront plus leur proie. En vain Hyder-Ali les assiégera-t-il en 1781, resserrant le blocus jusqu’à réduire la garnison aux pires extrémités de famine. Le 30 septembre de la même année, sir Eyre Coote, vainqueur des Mysoriens à Sholingur, ravitaille la place où le colonel Ross Lang dirige la résistance avec une opiniâtreté stoïque. Le lieutenant Parr, qui commande dans le Sajjaraoghiri, ne déploie pas un moindre héroïsme. Contre ce fort, les officiers français à la solde des Mysoriens usèrent leur talent et leur courage sans parvenir à éteindre ses feux, non plus d’ailleurs que ceux des autres ouvrages de l’enceinte. Et, au mois de janvier de l’année suivante, une exposition