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L’IRLANDE RELIGIEUSE

Lorsque Edouard VII, en ceignant la couronne britannique, dut naguère, selon la tradition, déclarer en un serment solennel et « en présence de Dieu » le catholicisme « superstitieux et idolâtre, » — « idolâtres » ses dix-neuf cent mille sujets catholiques de Grande-Bretagne et ses trois millions et demi de sujets catholiques irlandais, — l’Angleterre catholique sourit et, sûre de sa force, protesta sans s’émouvoir : en Irlande au contraire, tandis que la minorité protestante triomphait bruyamment, fière d’avoir fait maintenir, après avoir craint un moment de voir abroger, cette déclaration fondamentale d’indignité à l’adresse de la majorité « papiste, » celle-ci frémit sous l’injure officielle où elle trouvait une nouvelle raison de haïr l’Angleterre et qui, marque d’opprobre, rappelait et symbolisait à ses yeux tout un passé de souffrances et d’asservissement. C’est que la question religieuse occupe en Irlande une tout autre place qu’en Angleterre. Nulle part elle n’est plus aiguë, nulle part elle n’est plus intimement mêlée à la vie publique ou sociale, à la question politique ou nationale. Et c’est pourquoi nous voudrions, après avoir retracé ici même le mouvement psychologique et le mouvement politique[1], étudier le mouvement religieux de l’Irlande contemporaine.

  1. Voyez la Revue des 15 avril 1902 et du 15 mai 1903.