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allusion à des matières politiques ou administratives. Dans la pratique, l’admiration de Son Excellence pour l’Australie, le plaisir qu’Elle éprouve à être présente, la beauté de l’œuvre qui a organisé la réunion, la puissance de l’Empire et le loyalisme de ses sujets, suffisent à alimenter cette littérature officielle.

Leurs Excellences ont en outre l’obligation de donner un certain nombre de dîners, de bals et de garden parties. Une étiquette sévère ou indulgente, — cela dépend du caractère et des idées du gouverneur, — mais plutôt sévère, est observée dans ces réceptions.

Je regrette qu’il me soit impossible, sans évoquer des personnalités, de conter ici bien des anecdotes amusantes au sujet des rapports des gouverneurs australiens avec leurs pseudo-administrés. Certains sont arrivés, avec du tact et de la bonhomie, à contenter presque tout le monde ; d’autres ont, par leurs excentricités ou leurs prétentions, excité la verve des journaux satiriques et achevé leur mission dans une complète impopularité. On comprendra que je ne puisse entrer dans des détails qui désigneraient, sans les nommer, ceux-ci ou ceux-là.

Il est permis de constater cependant que ces personnages choisis par le gouvernement anglais (bien que payés sur les budgets australiens), appartenant à la noblesse du royaume, entourés d’un prestige incontesté d’hommes du monde et même du grand monde, accompagnés de femmes élégantes et distinguées, avaient de rares facilités pour accomplir une œuvre intéressante, celle de guider la formation de la société australienne. Ils ne l’ont pas entreprise. C’était pourtant le seul service qu’ils pussent rendre au pays où ils venaient remplir des fonctions presque uniquement décoratives. Ils étaient liés, je le veux bien, par des obligations protocolaires, mais non au point d’être privés de toute initiative. Quelques gouverneurs ont clairement laissé voir qu’ils possédaient assez d’autorité pour imposer leurs préférences, même celles de leurs aides de camp. Aussi l’influence du Government house n’a été sensible dans aucun des États australiens, sur les usages non plus que sur les habitudes d’esprit de la société. Au lieu de l’aider à réagir contre les tendances étroites et l’instinct d’imitation qui accompagnent nécessairement les débuts d’une nation, la plupart d’entre eux n’ont songé qu’à garder leurs distances, montrer les banalités du luxe officiel et les raideurs d’une étiquette surannée. Le milieu où ils ont introduit