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génie, son talent ou sa sottise, ses vertus et ses vices, sa torpeur ou son activité. Ce qui en émerge jusqu’à la conscience est peu au prix de ce qui reste enseveli, quoique agissant. La personnalité consciente n’est jamais qu’une faible partie de la personnalité physique. »

Le problème de la personnalité, comme celui de la mémoire, se trouve en dernière analyse réduit à un problème biologique. Mais c’est là encore un point d’arrivée, non un point de départ, une conclusion, non un postulat. Cette vue résume simplement les faits, toutes les déformations morbides de la personnalité, ses troubles organiques, ses troubles affectifs et intellectuels, ses dissolutions et dédoublemens, ses aliénations, alternances et substitutions.


Cette psychologie morbide est-elle la forme définitive de la psycho-physiologie ? Il serait prématuré de l’affirmer. Seulement, alors que toutes les autres déclinaient, celle-ci a triomphé : ce même congrès de Rome, qui consacra la chute de la psychométrie, mit en lumière l’activité de la pathologie mentale, sa fécondité, et aussi le renom de l’École française, dont elle est la forme la plus spontanée et la plus neuve.

Car les disciples de M. Ribot font chaque jour un pas de plus dans la voie qu’il avait ouverte. Formé à l’ancienne mode, uniquement psychologue, il avait été obligé le plus souvent, dans ses recherches pathologiques, de s’en tenir à des renseignemens de seconde main : il n’était pas médecin. Ses continuateurs le sont devenus. Ils se sont installés dans les asiles. Quelques-uns même s’exercent à la thérapeutique, par scrupule de savans, essayant de vérifier leurs conceptions théoriques par le contrôle immédiat et bienfaisant de la guérison : ce sont des cliniciens. Quand ils enseignent, ils présentent dans leurs cours les malades qu’ils ont étudiés à l’hôpital. Le public les écoute avidement, rien ne paraissant à la foule bourgeoise plus romanesque, plus fantastique, plus égrillard parfois que les perturbations mentales. Quelques-uns même se spécialisent dans les maladies pittoresques, grivoises, et la pathologie a pénétré dans les « salons parisiens. » Elle a ses revues à elle et elle ne dédaigne pas les autres. Elle règne également parmi les savans et les badauds.

Ce succès ne lui a pas été nuisible ; au contraire. Il l’a aidée