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Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 35.djvu/296

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statu quo en Orient en rédigeant ou en appuyant la note du 30 décembre 1875. Écrite par un Madgyar, par un ami de la Turquie, la « note Andrassy » renonçait au système anglais des réformes générales et à la centralisation pour préconiser le système des réformes particulières, adaptées aux besoins et au tempérament de chacune des populations de l’Empire. Le massacre des consuls de France et d’Allemagne à Salonique, les progrès de l’insurrection bulgare, ne tardèrent pas à « engager les cabinets à resserrer leur entente » et à la constater en rédigeant, le 13 mai 1876, le mémorandum de Berlin : les trois cours y recommandaient plus énergiquement des réformes, mais il y était question, pour la première fois, de « peser » sur le gouvernement ottoman et, si besoin était, de faire suivre l’action diplomatique de « mesures efficaces. » La France et l’Italie se hâtèrent d’adhérer au memorandum, mais l’Angleterre répugnait à se mettre à la remorque d’une politique qui n’était pas la sienne et qui devait conduire tôt ou tard à l’émancipation des peuples balkaniques ; elle refusa de se joindre aux gouvernemens du continent et, pour les décourager de recourir à une pression armée, elle envoya sa flotte dans la baie de Besika, à l’entrée des Dardanelles. En même temps, une révolution de palais déposait Abd-ul-Aziz et mettait sur le trône son héritier Abd-ul-Hamid. L’intervention des trois empereurs avait échoué : le champ restait libre pour l’action de l’Angleterre. Tandis qu’Alexandre II et François-Joseph, persuadés qu’une solution pacifique devenait de plus en plus improbable, se rencontraient le 8 juillet 1876 à Reichstadt et jetaient les bases de l’accord signé le 15 janvier 1877 qui allait assurer à la Russie, en cas de guerre, la neutralité autrichienne, moyennant l’occupation de la Bosnie et de l’Herzégovine, lord Derby élaborait un programme de réformes et le soumettait à la Porte ; mais ni les chrétiens révoltés, auxquels le cabinet de Saint-James refusait toute espèce d’ « autonomie locale, » ni le Sultan, qui savait que le gouvernement britannique repoussait d’avance toute idée de contrainte, ne firent bon accueil à la note du Foreign Office ; l’heure de l’action arrivait et, à Londres, où l’on s’y sait peu apte dès qu’il s’agit d’aller plus loin que l’inoffensive manifestation navale, on cherchait le moyen de s’y dérober. La presse libérale, à la suite des harangues de Gladstone, dénonçait les « horreurs de Bulgarie » et réclamait une intervention énergique ; mais, sur place, les