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Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 35.djvu/389

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habitans, alors que la proportion ordinaire est de un sur huit. C’est qu’on ne réside pas en cette région. Tous ceux qui le peuvent, cherchent le repos hors du tumulte. Ceux qui restent, semblent bien y être obligés par leurs fonctions ; au contraire des étrangers, ils ne sont pas là de plein gré.

Si l’on traçait une ligne, partant du Louvre vers les boulevards, on isolerait à gauche une région où il n’y a pas de pauvres ; à droite, il en existe quelques-uns. Ce sont, vers Saint-Germain-l’Auxerrois, quelques vieillards, et aussi, quelques ouvriers qui sont parvenus à découvrir une chambre, non loin de la maison qui achète leur travail ; et, au nord des Halles, une population très peu stable, qui vit des miettes du marché et de la vente des journaux. Ainsi, la bonne administration des secours publics nous apparaît comme devant tenir compte de ces faits : très peu de pauvres, peu d’enfans, pas de patronage, c’est-à-dire pas de riches résidant auprès des malheureux, quelques vieillards et artisans dont le logement doit être la charge principale et de nombreux adultes, en quête d’une place, et qui, n’en trouvant pas, devraient être aidés, sinon forcés, à rejoindre le lieu d’où ils viennent.

On a eu la bonne idée, en 1900, de montrer sous verre, dans les galeries du Champ-de-Mars, une fourmilière au travail. Si l’on pouvait voir en raccourci le troisième arrondissement, on aurait une impression semblable. Les rues y sont nombreuses, étroites, peu régulières, mal soignées, bordées de hautes maisons, où les inscriptions s’entre-choquent dans un désordre pittoresque ; les produits d’un travail attentif s’entassent dans ces locaux qui sont autant de réduits où des artisans de mérite exercent toutes les qualités qu’ils tiennent de leur race et de la tradition. C’est le lieu de production de l’article de Paris. Il est fait d’or, d’argent, de cuivre, d’étain, de plomb, ou bien d’écaille, d’ivoire, même de celluloïde : on a trouvé le moyen d’imiter, à s’y tromper, les pierres précieuses, avec cette matière qui n’a pas de valeur. On fait des bijoux qui sont des œuvres d’art et des objets pour les baraques foraines. On travaille la plume, la caoutchouc, les bois précieux ; on invente la forme nouvelle du jouet, de l’article de pêche, du manche de canne ou de parapluie, de la gaine pour couteau. On parvient à recueillir jusqu’aux rognures de toutes ces matières ; c’est à cela que s’emploient, avec profit, les brûleurs de cendres du quartier des Archives.