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II

Le Paris des arrondissemens excentriques, c’est la plus grande » ville. Deux parts sont à faire dans ces arrondissemens : la vie propre de l’endroit, trouvant son principe dans l’industrie locale ; et la vie de Paris prolongée, dont la source est au centre, mais dont les agens résident ici. Par-dessus tout, ce sont des lieux d’habitation. La population se compose, en partie, d’élémens nouveaux : toutes les grandes Compagnies de chemins de fer qui ont établi leurs gares de marchandises à l’extrémité de la ville. puis, toutes les grandes entreprises de travaux publics et de roulage qui ont trouvé, dans cette région, le terrain nécessaire pour loger leur matériel ; puis, les grosses manufactures et usines ; puis, les métiers de rebut, tels que l’industrie du chiffon, qui n’auraient pas au centre les tolérances nécessaires ; puis, les anciens groupemens de communes suburbaines qui parfois ont des traits de particularisme original. Enfin, une bonne part des habitans ont leurs occupations journalières dans Paris. Jusqu’ici, pour définir le caractère général d’un arrondissement, d’un quartier, ou même d’une rue, il suffisait d’ouvrir les yeux Maintenant, les murs sont muets ; il faut voir à l’intérieur pour apprendre ce qui s’y passe.

Au douzième, les quartiers ne se ressemblent pas du tout., Il en est deux qui sont en étendue le tiers ou la moitié des autres : Bel-Air avec 13 000 habitans, et les Quinze-Vingts avec près de 50 000. Les deux autres, qui occupent les trois quarts de l’arrondissement comptent 50 000 âmes pour Picpus et 10 000 seulement pour Bercy. De même, les caractères de la population varient beaucoup. A Bel-Air, ce sont des employés ou petits rentiers ; aux Quinze-Vingts et dans une partie de Picpus, des ouvriers et employés de chemins de fer ; le reste de Picpus est habité comme Bel-Air ; quant à Bercy, la place presque entière est prise pai l’entrepôt des vins et par les dépendances de la gare de Lyon. Depuis la place Daumesnil jusqu’à la place de la Nation, il n’y a presque que des couvens ; les orphelinats de filles sont si nombreux, qu’à population égale, il y a 3 000 enfans de plus à Picpus qu’aux Quinze-Vingts, dont 2 000 filles environ. On fait des tonneaux à Bercy, des meubles aux Quinze-Vingts. On transporte sur le quai de la Rapée de la pierre, des briques et du sable.