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qui sont situées à l’écart des grandes voies, et dans les hôtels qui, sans être aussi nombreux qu’à Grenelle, servent pour tant d’abri à plus de 3 000 personnes. Parmi elles, on peut reconnaître quelques journaliers du bâtiment qui vont se louer « au coin, » sur le boulevard, près l’impasse de l’Astrolabe, quand l’envie leur prend de chercher du travail, et quelques professionnels de la mendicité dont le terrain d’opérations est aux abords des églises du sixième arrondissement. Enfin, il n’est pas possible d’abandonner ce quartier sans avoir constaté la présence de tous ces établissemens aux longs murs, hôpitaux, hospices, institutions, maisons de santé et couvens qui contribuent au calme sourd des rues. L’animation s’éveille aux heures de départ pour le travail et à celles du retour ; à ces momens, la foule se presse, comme sur nos promenades, aux jours de fête.

Cette foule se disperse dans Necker, ou va plus loin dans Saint-Lambert. Là encore, l’habitation est le caractère dominant ; mais l’aisance est moins large. Le prix des denrées s’élève au lieu de baisser. Cela doit tenir aux crédits que doivent faire les marchands à leur clientèle besogneuse, car les mêmes choses se trouvent à bon compte sur les marchés en plein vent de la rue de la Convention, où l’on paie comptant. La population ouvrière est assez importante. Elle provient de l’usine à gaz, du dépôt des omnibus, des remises des loueurs de voitures, des ateliers de charpente, des chantiers de travaux publics où les charretiers, tailleurs de pierres et maçons se réunissent pour le travail, du nouvel abattoir de Vaugirard, enfin de la grosse colonie de chiffonniers dont le point central est au boulevard Chauvelot. Une bonne part du territoire de Saint-Lambert, qui est sensiblement plus vaste que celui de ses voisins, était occupée autrefois par des maraîchers. Il en existe encore ; mais, peu à peu, leurs terrains se couvrent de maisons. Les officiers des casernes ont eu vite fait de découvrir les ressources qui s’offrent en logement ; tous ceux qui n’ont pu faire leurs cantonnemens au Gros-Caillou, sont ici. A côté d’eux, quelques artistes, des sculpteurs surtout, se sont fait construire d’élégantes villas.

A Grenelle et à Javel, les rues ne sont pas orientées comme à Necker ou à Saint-Lambert. Les unes partent des fortifications et se dirigent vers le Champ-de-Mars, c’est-à-dire vers le désert ; les autres coupent les premières à angles droits. Pour aller là,