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en tirent parti sont des ouvriers habiles en chaussures, en bijouterie, en pièces de fer ou de cuivre. A l’extrémité du quartier du Combat, près de la rue de Crimée, on constate, dans les passages du Nord et du Sud, une réunion assez importante de chiffonniers. La mairie du dix-neuvième arrondissement est dans cette région. Chacun sait que le maire est un sculpteur de grand nom. Les artistes ont, en effet, découvert qu’on pouvait, comme à Montmartre, s’établir dans ce lieu d’altitude. Il reste place aux amateurs, car les terrains non construits occupent encore de grands espaces. On y voit paître quelques chevaux, derrière les murs. Toute la région comprise entre la rue de Crimée, le parc, et le boulevard de la Villette, est très malheureuse. Au numéro 32 de la rue de Meaux, par exemple, il y a plus de 300 ménages dont un quart se compose d’inscrits du bureau de bienfaisance. Le passage des Fours-à-Chaux, la rue des Chaufourniers, la rue Petit, ne sont pas beaucoup moins lamentables.

La région de Belleville, entre le parc et le funiculaire, est un territoire d’habitation. Il existe encore des terrains vagues ; mais l’œuvre de peuplement s’est accomplie. On peut user d’un moyen rapide de transport vers le centre. Aussi, un très grand nombre d’employés, d’ouvrières de l’aiguille, des fleurs et de la plume ont-ils trouvé pratique de fixer leur domicile dans la rue de Belleville, sur la pente et sur le plateau. Il y a beaucoup d’ouvriers peintres, vitriers et peintres de lettres ou d’enseignes, et aussi beaucoup de travailleurs en chambre qui produisent, pour les petits industriels des environs du Temple, les articles dits « de Paris » et la petite bijouterie. Comme on voit, le voisinage relatif du canal et des abattoirs n’influe pas sur la composition des habitans. La configuration du sol est suffisante pour en fournir l’explication. Sitôt qu’il faut monter, l’homme cherche ailleurs, à moins qu’il n’ait une raison pour prendre de la peine. Le funiculaire offre ses services à la foule qui fréquente la place de la République ; c’est là que la population de Belleville prend sa source. Les pauvres sont légion. Leur présence se trouve pour ainsi dire soulignée par l’existence des boucheries hippophagiques. Toutes les fois qu’on en voit quelque part, on peut être sûr que la région est habitée de la pire façon. À ce point de vue, les rue, passage et impasse du Plateau, la cité du Tunnel, l’impasse Saint-Vincent, la rue Hasard et la rue de la Villette