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Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 35.djvu/717

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s’il les fermait, une révolte du sentiment général. Cette révolte] sera-t-elle moins vive s’il interdit à un prêtre de baptiser un enfant dans ces églises mêmes, ou d’y célébrer sur un cercueil le service des morts ? Elle le sera plus, au contraire ! Il y a des défis qu’on ne lance pas impunément au sens commun, et ce que l’opinion pardonnerait le moins au gouvernement serait, en pareille matière, le manque de franchise et de loyauté. Mais comment les évêques pourraient-ils savoir dès aujourd’hui ce que fera le ministère ? Et, alors, comment pourraient-ils donner no varietur des instructions qui doivent rester subordonnées à des circonstances encore indéterminées ?

On annonce beaucoup d’interpellations pour la rentrée de la Chambre. Un grand débat est inévitable, et d’ailleurs désirable. Nous avons besoin de savoir quelle interprétation le ministère donne à la loi, et quelle application il compte en faire. Un député du Jura M. Charles Dumont, a déjà confié à la presse son projet de discours, Nous ne sommes pas d’accord avec lui sur tous les points, tant s’en faut ! car il propose de retirer au clergé toutes les ressources que la loi lui concède pour l’aider à traverser la période difficile au bout de laquelle il devra se suffire à lui-même. Cette mesure de représailles contre le Pape serait barbare à l’égard du clergé, qui n’est responsable de rien. Quoi qu’il en soit, M. Dumont est de ceux qui veulent remanier la loi, et qui ne voient même pas comment elle pourrait désormais être appliquée telle quelle. Il est tout à fait de notre avis, ou nous sommes tout à fait du sien, lorsqu’il écrit : « Quel est le devoir du législateur républicain à l’égard du catholique ultramontain, comme de tout autre croyant de n’importe quelle religion, actuelle ou future ? Ce devoir est simple, clair, impérieux. Nous devons aux catholiques ultramontains le libre exercice de tous leurs droits naturels, tels que les reconnaît la société issue de la Révolution, c’est-à-dire, entre autres, la liberté de croire, avec le droit, qui en est la nécessaire conséquence, d’exercer publiquement leur culte. A l’exercice de ce droit au culte public, tous les hommes de bon sens jugent les édifices actuels du culte actuellement indispensables. Nous laisserons les églises ouvertes. La célébration des cérémonies cultuelles dans les églises laissées ouvertes ne saurait être considérée comme un délit. La dernière circulaire de M. Briand semble le dire. Si elle le disait effectivement, elle devrait être expressément répudiée par le gouvernement. Tendre un piège aux catholiques en laissant des églises ouvertes où leurs prêtres n’auraient pas le droit de les convoquer serait indigne de n’importe quel gouvernement et