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eussent considéré comme une apostasie toute compromission avec l’infernale Révolution et ses œuvres démoniaques. Ainsi se fit, indépendamment de la vieille querelle qui subsistait entre catholiques et constitutionnels, une nouvelle et grave scission dans le clergé français, entre catholiques eux-mêmes. La division ne portait sur aucun point de dogme ou de discipline, mais seulement sur la grande question de savoir si l’Église doit se désintéresser des formes de gouvernement et peut accepter en conscience toute puissance établie. Ce qui s’agitait alors sous une forme pressante et aiguë, c’était ce qu’on a nommé de nos jours le problème du ralliement. Il y eut les ralliés et les intransigeans, ceux qui firent la promesse et ceux qui s’y refusèrent ; une minorité de soumis contre une majorité d’insoumis.

Les soumis ne furent plus inquiétés et purent librement exercer le culte, moyennant subvention des fidèles. Ils l’exerçaient dans les églises rouvertes, lorsqu’elles n’étaient pas occupées par les constitutionnels ; ils exerçaient de préférence dans les chapelles et oratoires que les fidèles étaient libres d’ouvrir en se conformant à certaines dispositions légales. Dans ces asiles discrets, le catholicisme se sentait plus chez lui : il n’avait à y subir aucun contact profanateur ; il aimait à s’y enfermer dans une sorte de pénombre, dans une atmosphère d’intimité, comme s’il eût craint de passer brusquement de l’obscurité des catacombes au grand jour des basiliques dévastées.

Les insoumis ne furent pas admis au bénéfice de la liberté légale. Ces récalcitrans n’en restaient pas moins disséminés sur la surface du territoire et persistaient à remplir leur ministère, sans l’aveu des autorités. Ils disaient la messe en maisons privées ou en retraites rustiques. A côté du culte qui s’exerçait dans un certain nombre d’églises, à côté du culte qui s’exerçait licitement dans les oratoires, il continuait d’exister un culte illicite, un culte en chambre ou en grange, clandestin, souvent nocturne, troublé par les Jacobins locaux ; c’était celui que préféraient les catholiques fervens et la presque-totalité des populations rurales.

Il était traité différemment selon les régions. Dans le Pas-de-Calais, le préfet Poitevin-Maissemy se donne encore le plaisir de chasser au prêtre et se plaint que ce gibier se terre : « Il est extrêmement difficile de les atteindre en ce que, n’exerçant les cérémonies de leur culte que la nuit dans des maisons particulières