Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 37.djvu/736

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et le modèle de tout progrès pour la civilisation, l’art et la science modernes.

Voilà pourquoi, au XVIe siècle, on s’appliqua à rattacher l’orthographe des mots français à leurs origines latines et grecques. Cette opinion avait l’avantage de tendre à réduire à une formule précise la loi des corrections que l’on croyait utile de faire dans l’orthographe des mots, tels qu’ils s’étaient constitués au cours des temps, par l’évolution propre des différens dialectes provinciaux.

Aujourd’hui même, les règles étymologiques sont encore observées soigneusement dans la création des mots nouveaux tirés du grec ou du latin, mots créés pour désigner soit des substances ou des instrumens jusque-là inconnus, soit des notions spéciales, dans l’ordre de la science et de l’industrie. Mais il en est tout autrement de la langue courante ; les philologues novateurs ayant constamment tendu, depuis le XVIIe siècle, et plus encore de notre temps, à écarter le système étymologique, entaché à la fois de pédantisme et de superficialité, et fécond en difficultés pour l’orthographe et la prononciation normales.

Le principe sur lequel s’accordent maintenant la plupart des novateurs est à la fois plus général et plus simple, en théorie, du moins : c’est le phonétisme. Il repose sur l’obligation d’établir une exacte conformité entre l’écriture des mots et leur prononciation. L’écriture, dit-on, est la parole écrite, l’image de la voix : opinion excessive en fait, car l’écriture a débuté dans l’histoire par être l’image des objets, première phase dont nous possédons des exemples bien connus chez les anciens Mexicains. De là sont dérivés, par des modifications graduelles et des signes fort dissemblables, les systèmes hiéroglyphiques de l’Egypte et de la Chaldée ; un système analogue demeure encore en vigueur chez les Chinois. Nos écritures alphabétiques tirent leur origine, comme on sait, d’une transformation des signes hiéroglyphiques, dont la construction première était étrangère au phonétisme.

Quoi qu’il en soit, il serait évidemment commode d’établir une conformité ; aussi exacte que possible entre la langue apprise par l’oreille et la langue enseignée par les yeux.

Dans une langue idéale, on conçoit que tout mot devrait posséder une signification unique, répondant à un même son ou ensemble de sons, et représenté par une orthographe unique.