Avec cette lenteur des choses végétales,
Seul bruit dans le mystère en extase arrêté,
Seul mouvement furtif dans l’immobilité,
Elles laissent tomber un à un leurs pétales.
Et molles, au doux rythme espacé de leurs chutes,
Elles ont l’air parfois de mesurer le temps ;
Et c’est presque, en mon songe éveillé, par instans,
Comme si j’entendais s’effeuiller les minutes…
Aujourd’hui, c’est un jour simple, et comme tant d’autres,
Un jour vague où se montre à peine le soleil,
Un jour de France, pâle, un peu terne, et pareil
Aux doux horizons gris et bas qui sont les nôtres.
Et sous le ciel confus, blanc ou blond tour à tour,
Selon que le soleil s’atténue on persiste,
Je songe, par ce jour qui n’est ni gai ni triste,
Je songe, par ce jour banal, qui n’est qu’un jour :
Tandis que j’erre en paix au jardin solitaire
Où la ville voisine expire sa rumeur,
Partout en ce moment on crie, on pleure, on meurt,
A travers l’étendue immense de la Terre…
Oui, par ce jour voilé, qui n’est pas même bleu,
Qui n’insulte pas même à la détresse humaine,
Où nul poing révolté ne peut brandir sa haine
Vers l’azur d’où l’accable un impassible Dieu,
Par ce jour modéré, qui n’est pas non plus sombre,
Où rien ne semble, au ciel diaphane, peser
Sur l’homme en bas chétif et las, pour l’écraser,
Où le malheur ne peut pas même accuser l’ombre,